TOURS : Le camp de la dernière chance

Depuis vendredi 19 juin, une trentaine de demandeurs d’asile s’est regroupée sous des tentes au Sanitas. Ils sont menacés d’expulsion.

Les tentes installées dans l’Allée de Luynes du quartier tourangeau du Sanitas n’ont pas simplement été montées pour attirer les médias locaux et ainsi faire parler de la situation préoccupante des demandeurs d’asile installés dans la région et condamnés à rester à la rue faute de places en hébergement d’urgence. Non, elles sont surtout là pour éviter à tous ces étrangers (Arméniens, Géorgiens, Guinéens…) de passer des nuits seuls dans la rue, avec les risques que cela peut entraîner, notamment pour les familles avec enfants dont certains sont malades.

Parmi la trentaine de personnes installée là depuis ce week-end, il y a d’ailleurs beaucoup de familles, et 12 enfants de 18 mois à 14-15 ans (une bonne partie d’entre eux étant scolarisée). Certains sont en Touraine depuis des mois, d’autres sont arrivés plus récemment. Tous connaissent le même sort : quand ils appellent le 115 pour une nuit à l’abri, ils se font souvent refouler. « Ou parfois, on ne propose un logement qu’au père, sans sa femme et ses enfants. Qui accepterait pareille situation ? » s’alarme Muriel, une militante qui soutient l’association Chrétiens Migrants, à l’initiative de l’installation de ce campement, « mais si ils refusent, alors il devient impossible pour eux d’obtenir quoi que ce soit pendant 6 mois » poursuit cette bénévole engagée depuis dix ans, parfois à bout de forces mais toujours sur le devant de la scène

Un huisser est passé lundi, l’expulsion est imminente

Depuis la décision presque improvisée de monter les tentes, Muriel n’a pas quitté le camp. Avec Rose-Marie, bénévole incontournable de Chrétiens Migrants qui gère l’appartement-refuge de l’association au rez-de-chaussée d’un immeuble, elle s’occupe des repas, d’organiser des jeux, de discuter avec les migrants : « on arrive même à avoir le wifi pour faire des ‘points Internet' » sourit-elle vu que le camp est à seulement 10m des fenêtres du local de l’association : « cela nous permet d’avoir la cuisine et les douches à proximité » précise-t-elle, ce qui n’aurait pas été le cas d’un autre site avec éventuellement plus de passage pour rendre la cause visible mais du coup moins de « confort ».

« Depuis que nous sommes là, les habitants sont bienveillants. Hier, les enfants du quartier ont joué avec les nôtres. Des bénévoles sont venus avec des boules de pétanque, on a récupéré un ballon de foot… Nous prenons tous les repas ensemble. C’est quand même mieux que de laisser chacun dans son coin. » La crainte de tous désormais, c’est l’expulsion. Après les visites de la police ce week-end, c’est un huissier – envoyé par le propriétaire du square, Tours Habitat – qui est venu constater le squat ce lundi matin : « rendez-vous compte, un bailleur social qui envoie un huissier… » s’indigne Muriel. Ce mardi, il est repassé avec un jugement confirmant une interdiction d’occuper les lieux pendant deux mois. « La troisième étape, c’est l’avis d’expulsion avec recours à la force publique. S’il revient avec, nous partirons. Nous ne voulons pas imposer aux campeurs une évacuation par la force. Nous espérons juste qu’ils nous laisserons le temps de remballer nos affaires. » Car les tentes ne leur appartiennent pas : certaines ont été prêtées par une association jocondienne, d’autres par Emmaüs.

Egalement soutenue par le Droit Au Logement, la Cimade ou la Croix Rouge, cette opération coup de poing de Chrétiens Migrants n’est donc pas isolée. « Des habitants sont aussi venus nous apporter des couvertures, des vêtements ou de la nourriture. Nous avons également vu d’anciens demandeurs d’asile que nous avions aidés revenir pour voir si nous avions besoin de quelque chose. » La priorité, ce serait bien sûr des logements : « rien qu’au Sanitas cet hiver, nous en avons compté 229 de vides. C’est bien plus qu’il n’en faut pour loger tout le monde, des solutions existent ! » pointe encore la militante qui espère aussi que Chrétiens Migrants réussira à renflouer ses comptes. Cette année, elle n’a toujours rien touché de la part de la mairie de Tours et regrette aussi qu’aucun de ses représentants ne soit venu Allée de Luynes depuis l’installation du campement.

La mairie s’agace

Une position vivement critiquée par la ville de Tours qui a réagi via un communiqué lundi après-midi : « Ces dernières années le nombre de places d’accueil a été augmenté sur Tours pour atteindre 528 places dont 167 pour les demandeurs d’asile. L’accueil de ces demandeurs d’asile est géré au niveau régional et la préfecture d’Orléans est la seule compétente. La Ville ne peut se substituer à l’Etat. Par ailleurs, ces mêmes responsables associatifs ne peuvent pas affirmer qu’il n’y a aucun contact avec la municipalité depuis des mois alors qu’ils sont en relation constante avec l’adjointe au Maire déléguée à l’action sociale et au logement, Alexandra Schalk-Petitot; avec la responsable du CCAS, Marion Nicolay-Cabanne, et que le Maire de Tours, Serge Babary, a reçu lui-même le président de l’association, Louis Barraud  le 27 avril dernier. Ce comportement vis-à-vis de la municipalité n’est pas acceptable étant donné les efforts faits par tous les Tourangeaux pour l’accueil des personnes en difficulté. »

Olivier COLLET

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