A Tours, des locaux du Diocèse réquisitionnés pour les demandeurs d’asile

Le squat est géré avec l’aide d’associations locales.

C’est un local paroissial situé au cœur du quartier Ste Radegonde de Tours, en face d’une belle demeure, à deux pas d’un arrêt de bus : depuis le vendredi 6 avril, ces grands locaux avec jardin appartenant au Diocèse sont réquisitionnés par le collectif d’associations Résistance 37 (Chrétiens Migrants, Utopia 56, La Table de Jeanne-Marie…) afin d’accueillir les demandeurs d’asile qui ne trouvent pas d’hébergement lorsqu’ils appellent le 115, le numéro d’urgence dédié aux sans abris géré par l’association Entraide et Solidarité.

La nécessité de trouver un lieu pour toutes ces personnes (parmi lesquelles des familles, des hommes, des mineurs isolés) ne date pas d’hier mais s’est renforcée à la fin de la trêve hivernale, lors de la première semaine d’avril, quand les places supplémentaires dédiées à l’hébergement d’urgence ont fondu comme neige au Soleil : « les premiers jours on s’est relayés entre bénévoles pour accueillir tout le monde et ensuite on a eu l’information qu’il y avait ces locaux inoccupés depuis longtemps et qui n’étaient pas fermés » expliquent les membres du collectif, à l’ombre des arbres du jardin.

Derrière la porte, on trouve une chapelle (laissée vide par respect pour le lieu de culte), et une succession de pièces. 5 chambres pour les familles ont été aménagées au premier étage, d’autres chambres pour les hommes et les mineurs sont disponibles au rez-de-chaussée, elles sont baptisées « Chocolat » ou « Eléphant » : « ce sont les enfants qui ont choisi les noms » nous explique-t-on pendant qu’on fait le tour des couloirs… L’une des chambres, la plus spacieuse, dispose même d’un balcon avec vue sur le petit par cet d’un grand espace de jeu. Il y a également des sanitaires et une grande salle commune pour prendre les repas.

Un grand élan de solidarité

Que ce soit les lits, les nombreux jouets, les vêtements, les livres ou la nourriture, tout ce qu’on trouve dans ce lieu baptisé Le Bercail provient de dons : « il y a une grande solidarité qui s’est mise en place, notamment grâce aux réseaux sociaux et même aux voisins avec qui ça se passe très bien » poursuivent les bénévoles qui se relaient 24h/24 et ont fait un planning de présence pour que quelqu’un soit toujours sur place, la nuit mais aussi dans la journée, une période ou bien souvent les sans abris se retrouvent sans solution (hormis des accueils pour familles, pour les femmes ou La Barque, le café solidaire de la Rue Colbert).

La trentaine de personnes accueillies dans la propriété de l’Eglise, « uniquement en cas de refus d’hébergement du 115 auquel on ne veut pas se substituer », sont déjà connues des différentes associations d’aide aux réfugiés, et on compte une bonne moitié de mineurs : « toutes et tous attendent des places en CADA (les centres d’accueil pour demandeurs d’asile) » nous assure l’équipe du Bercail, une partie des enfants est par ailleurs scolarisée dans les écoles de la ville, et des adultes sont suivis par d’autres structures, par exemple pour des cours de français.

« Ce petit garçon est là depuis 3 jours. Quand il est arrivé ici, il était renfermé, maintenant il est beaucoup plus souriant » nous raconte encore le bénévole avec qui on visite l’espace quand on croise un des enfants en train de courir. Dehors, ça discute, le repas du soir se prépare tranquillement, les étagères sont pleines : à priori on ne manque pas de grand-chose ici, hormis d’un toit pérenne, d’une situation stable sans stress pour trouver un lit le soir : « tous les jours, les personnes accueillies rappellent le 115 » insistent les gestionnaires du Bercail qui demandent avant tout à l’État de trouver des solutions durables, « pas juste pour une nuit ou à l’hôtel. »

Mettre l’État face à ses responsabilités

La demeure étant squattée, le Diocèse de Tours n’a évidemment pas été prévenu en amont, « on est en contact avec eux » se contentent de répondre les bénévoles quand on les interroge sur le sujet. Idem au sujet de leurs échanges avec la Direction Départementale de la Cohésion Sociale. En revanche ils sont plus bavards (et surtout plus véhéments) envers le service de l’Aide Sociale à l’Enfance : « on a été les voir, ils ont tout simplement refusé de recevoir les mineurs et de les évaluer, ils nous ont dit que ce n’était pas leur problème, qu’ils n’avaient qu’à aller ailleurs » affirment-ils face à nous.

Solidaires et indignées, les associations engagées pour soutenir les résidents du Bercail sont motivées et déterminées : « on n’est pas hors la loi, c’est le pouvoir qui est hors la loi en ne logeant pas tout le monde alors qu’il y a 15 000 logements vides à Tours » s’emporte Louis Barraud de Chrétiens Migrants. « On espère que dans 15 jours il n’y aura plus personne ici, que des solutions auront été trouvées » poursuivent Anne ou Angelo, tout en se disant aussi à se relayer aussi longtemps qu’il le faudra, même en cas de recours en justice des propriétaires (une procédure qui pourrait être très longue) : « on met l’État devant ses responsabilités. Ce sont des choses simples qu’on demande, on est pas des extraterrestres. »

Olivier Collet

Le collectif Résistance 37 est composé des structures suivantes : Collectif Albert Thomas, Utopia 56 Tours, Collectif Solidaire des Migrants de St Pierre des Corps, Chrétiens Migrants, Réseau Education Sans Frontières, La Table de Jeanne Marie et Sud Rail Centre Val de Loire

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