A Marmoutier, le spectacle encadré par des hommes en Travail d’Intérêt Général

La mairie de Tours étend son partenariat avec le Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation et innove. Reportage en avant-première.

Après les parcs et jardins, le service des sports, celui de la petite enfance ou la police municipale, pour la première fois, le service patrimoine de la ville de Tours accueille des personnes condamnées à des heures de travaux d’intérêt général. Ces peines, destinées à éviter la prison, le tribunal de Tours n’hésite pas à en prononcer (en moyenne 300 par an, un chiffre plutôt en progression).

Après un essai concluant en 2015 avec des missions confiées à 40 « tigistes », la municipalité a décidé de prolonger et renforcer son partenariat avec le SPIP37 (Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation, qui suit les personnes après le verdict des juges). Résultat : 50 personnes ont déjà effectué leur peine dans les différents services depuis janvier. 7 autres s’apprêtent désormais à passer leur été dans le cadre historique de l’abbaye de Marmoutier pour participer à l’organisation du spectacle L’Ombre du manteau dont la première est prévue le 8 juillet.

Ces hommes, condamnés pour des délits jugés en correctionnelle (par exemple vols ou violences) seront chargés d’encadrer les groupes de 60 visiteurs qui déambuleront à la nuit tombée dans l’enceinte du monument pour rencontrer les artistes avant un grand final acrobatique sur les murs de l’abbaye (16 représentations sont prévues). Mêlés à la vingtaine de bénévoles également mobilisés, ils assureront l’accueil du public, le guidage pendant la soirée ou un soutien technique : « cela va nous permettre de proposer un spectacle de meilleure qualité » explique Frédéric Dufrèche, responsable du service patrimoine, qui avait demandé jusqu’à 12 « tigistes » pour les différentes représentations programmées jusqu’à fin août (au maximum, les peines sont de 240h pour les majeurs).

Ce qui est aussi nouveau, c’est que Marmoutier n’accueille pas un condamné, mais plusieurs. En attendant de débuter leur travail ce jeudi 30 juin, ils étaient reçus lundi par l’artiste Christine Maillé qui prépare la création du spectacle afin de découvrir le site et ses spécificités en plein jour et mieux l’appréhender à la nuit tombée : « aucun d’eux n’était venu auparavant… » Timides, taiseux, les jeunes hommes sélectionnés en amont selon leur motivation et leur profil (notamment professionnel, la plupart ont un emploi ce qui leur permet donc d’être disponibles en soirée) semblaient pourtant plutôt intéressés par cette tâche plutôt innovante pour une peine judiciaire : « c’est un projet de partage, du gagnant-gagnant » renchérit Frédéric Dufrèche.

Afin de motiver les « tigistes » dont dépendra en partie la bonne marche du spectacle, Christine Maillé les met en valeur : « vous allez voir le spectacle en avant-première, vous serez donc en quelques sorte des super-spectateurs. Vous pourrez dire aux gens où se placer pour mieux voir par exemple. » Afin qu’ils soient reconnaissables, elle leur conseille de s’habiller en blanc ou en jaune. En revanche, et par souci de discrétion, pas question de signaler pourquoi ils sont là. Pour le public, ce seront des bénévoles comme les autres et les formalités administratives de pointage se feront à l’écart des regards avant le début de la soirée. La question que tous se posent c’est maintenant de savoir combien reviendront bel et bien pour débuter leur mission : « c’est rare qu’ils nous fassent défaut, moins de 10% ne sont pas venus » note l’adjoint au maire chargé de la sécurité Olivier Lebreton. Avec l’adjointe au patrimoine Françoise Amiot, ils envisagent déjà de renouveler l’expérience sur d’autres événements (comme les 10 et 20km de Tours pour distribuer de l’eau).

Propreté urbaine, entretien des installations sportives, travaux de jardinage ou à la cuisine centrale… « presque tous les services peuvent accueillir des TIG » résumé Dominique Morais responsable du Conseil Local de Sécurité. « Au début les agents étaient un peu frileux. Ca a un coût en temps, il faut souvent encadrer ces personnes pendant deux semaines. Ce n’est pas facile et on ne peut pas les emmener n’importe où mais au final le bilan est plutôt bon, c’est une façon de combattre le sentiment d’impunité et de lutter contre la récidive » affirme Olivier Lebreton.

La mairie de Tours est aujourd’hui devenue un partenaire privilégié du SPIP 37 « avec d’autres collectivités, des musées ou des associations comme Emmaus, la Croix Rouge, Emergence, le Secours Populaire… C’est juste plus difficile de trouver des structures d’accueil en zone rurale, pour des condamnés qui n’auraient pas le permis » explique Fabrice Van Couyck, conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation convaincu de l’intérêt de ces peines, « notamment pour des personnes qui n’ont pas exercé d’emploi depuis des années. »

Olivier COLLET

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