[Face à face] Michelin veut faire des économies et ça passe mal à Joué-lès-Tours

Le groupe français a annoncé un plan de compétitivité.

[Face à face] c’est la rubrique d’Info Tours pour faire le point en quelques minutes sur un débat local.

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C’est une information économique capitale en ce début d’année 2021 : le groupe Michelin annonce « un projet de simplification et de compétitivité pour accompagner l’évolution de ses activités en France. » Objectif : « améliorer significativement l’agilité et la performance globale des ses activités industrielles et tertiaires dans une démarche de co-construction et de dialogue social large. »

Derrière le langage administratif, il faut notamment retenir que Michelin compte supprimer « jusqu’à » 2 300 postes sur 21 000 dans les trois prochaines années, 1 100 dans le secteur tertiaire, 1 200 dans l’industrie. « Près de 60% des départs envisagés se feraient sur la base de départs anticipés à la retraite et le reste par des départs volontaires accompagnés. Pour tout poste supprimé, Michelin s’engage à contribuer à en recréer un autre, soit dans le cadre du développement de ses nouvelles activités, soit en prenant part à la redynamisation des bassins d’emplois, dans un calendrier réaliste » lit-on dans le communiqué de l’entreprise.

Olivier de Chassay, directeur de l’usine de Joué-lès-Tours.

Ce genre d’annonce a tendance à donner des sueurs froides en Touraine, où évoquer Michelin c’est très vite faire référence aux 700 postes supprimés en 2013-2014 à Joué-lès-Tours. 7 ans plus tard, la division jocondienne compte un peu plus de 200 salariés : « Il ne pèse aucune menace sur ce site. Nous avons la volonté de maintenir nos usines en France » promet son directeur Olivier de Chassay. Alors à quoi faut-il s’attendre ? Faut-il faire un simple calcul et estimer que 10% des effectifs supprimés en France ce serait aussi 10% à Joué, soit une vingtaine de postes ? Le dirigeant répond non, en tout cas que ce n’est pas aussi simple :

« Je ne sais pas vous dire combien d’économies on pourra générer localement. On va travailler dans les mois qui viennent, établir un programme de simplification de notre façon de travailler, voire ce que l’on peut digitaliser, automatiser. C’est un projet qu’on a lancé il y a 18 mois au profit des salariés qui se plaignent de lourdeurs, par exemple les normes de prévention ou d’hygiène tellement étoffées qu’elles inhibent les initiatives. »

Une certitude tout de même : Michelin Joué-lès-Tours va stopper son activité de fabrication de flaps, des bornes caoutchouc utilisées pour le montage des pneus avec une chambre à air : « C’est une technologie en perte de vitesse. Nous en produisions 750 000 en 2015, 70 000 en 2020, guère plus de 50 000 en 2021. On les vend au Moyen-Orient et en Asie et on ne gagne plus d’argent avec » détaille Olivier de Chassay. 7 personnes sont concernées : 2 partiront à la retraite, les 5 autres seront reclassées, « selon ce qu’elles souhaiteront » promet le directeur.

En face, côté syndicats, le discours ne convainc pas du tout… « C’est un choc dans un contexte des plus anxiogènes, rien ne laissait entendre qu’il y allait avoir ces 2 300 suppressions de postes en 3 ans et que cela concernerait l’ensemble des salariés » s’agace Jérôme Lorton, délégué du syndicat Sud, majoritaire sur le site tourangeau. Il en veut beaucoup à la direction :

« Michelin a bénéficié de 12 millions d’€ grâce au chômage partiel, le résultat net de l’entreprise est d’1,7 milliard d’€ en 2020, les salariés ont été remerciés pour leur investissement pendant la crise, on redémarre l’activité plein pot dans presque toutes les usines… A aucun moment les salariés ne s’imaginaient qu’on allait réduire les effectifs alors que de nombreux représentants du personnel demandent à la direction d’embaucher. La seule logique de cette décision est financière, c’est un effet d’aubaine vis-à-vis de la crise sanitaire. »

Evoquant un communiqué « flou » de la part de Michelin, Jérôme Lorton dénonce la philosophie général et se dit sceptique sur la promesse de non licenciement et de non fermeture d’usines : « Michelin s’apprête à annoncer des résultats exceptionnels, l’action progresse… Franchement ce n’est pas acceptable. Il n’y a pas eu de transparence ni d’anticipation dans ce projet. C’est à la fin qu’on verra si – effectivement – il n’y a pas eu de départ contraint. » Le représentant du personnel déploré aussi que le texte de la direction ne mentionne pas de projets d’investissements.

Des affirmations contestées par Olivier de Chassay, directeur de l’usine de Joué : « Il y aura des investissements liés aux idées intelligentes pour améliorer la productivité. Nous allons également construire une usine dédiée à l’hydrogène près de Lyon, la première de ce genre en France. On anticipe. Notre objectif est de maintenir notre outil à niveau et nos usines en France malgré le marché extrêmement concurrentiel. 1 pneu sur 2 vient d’Asie, c’était un sur 4 il y a 10 ans et leurs produits sont moitié moins chers ce qui nous met sous une forte pression même si ce n’est pas la même qualité. »

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