3000 km de cours d’eau en proie aux pesticides en Indre-et-Loire ?

C’est l’avis de la Sepant…

3 000 km de cours d’eau n’apparaissent plus sur les cartes officielles de la Préfecture en Indre-et-Loire. Des petits ruisseaux et des fossés essentiellement. A priori anodin, cet effacement a pourtant des conséquences importantes : en disparaissant de la sorte, l’utilisation de pesticides n’est plus interdite à proximité des berges.

En 2018 une association environnementale, la Sepant, avait déjà alerté sur le sujet. Elle réagissait alors à la publication d’une carte réalisée à l’été 2017 pendant le mandat l’ancien Préfet d’Indre-et-Loire, Louis Le Franc. Cette fois l’écho est plus important au regard de l’impact que peut avoir un JT télévisuel. Le 20h de France 2 est en effet revenu sur cette affaire ce mercredi 10 juillet et le constat dressé par le reportage est accablant : 3 000 km de cours d’eau n’apparaissent plus sur les cartes de la Préfecture concernant les ZNT (Zones de non traitement).

En disparaissant de la sorte, ces cours d’eau ne sont plus protégés contre les pesticides utilisés dans l’Agriculture. En clair, les agriculteurs n’ont pas le droit d’utiliser de pesticides à moins de 5 mètres d’un cours d’eau. Mais si ce cours d’eau n’apparaît pas sur la carte de la Prefecture, il n’existe pas officiellement. Donc la restriction ne tient plus. Et la Sepant, lanceuse de l’alerte, de s’interroger sur les conditions de cet arrêté, quitte à y voir le fruit d’un lobbying agricole important.

Un arrêté modifié récemment

Alors que le sujet était plutôt passé inaperçu depuis deux ans, il a une retombée toute autre aujourd’hui. Il faut dire qu’entre « marches pour le climat » et éveil des consciences environnementales ces derniers mois, ce genre de sujet ne peut que susciter l’incompréhension.

Les réactions sur les réseaux sociauxont immédiatement été nombreuses, des internautes interpellant parfois la Préfète d’Indre-et-Loire directement. Nous n’avons pas réussi à joindre la Préfecture ce jeudi matin. En revanche, sur le site de l’institution on trouve une modification de l’arrêté en question, datant de mai 2019. On peut y lire : « L’article 4 de l’arrêté préfectoral du 21 juillet 2017, en limitant l’interdiction d’application directe de produits phytopharmaceutiques au éléments du réseau hydrographique cartographiés par l’Institut géographique national, est plus permissif que l’article 4 de l’arrêté ministériel du 4 mai 2017 qui fait porter l’interdiction sur l’ensemble des éléments du réseau hydrographique (cartographié ou non). Par conséquent, l’article 4 l’arrêté préfectoral du 21 juillet 2017 doit être supprimé sachant que l’article de l’arrêté ministériel du 4 mai 2017 s’applique sans restriction. »

Pour Damien Avril de la Sepant, cette modification ne change rien au problème, constitué selon l’association par les articles 2 et 3 de l’arrêté de 2017. Ce sont ces deux articles qui fixent la définition des cours d’eau concernés par les Zones de Non Traitement. « La réglementation en place depuis 2017 est une régression » nous dit-il, « la réglementation précédente, qui prenait en compte la carte de l’IGN (Institut National de l’Information Géographique et Forestière) était cohérente » explique Damien Avril de l’association. La Sepant qui a d’ailleurs porté un recours contentieux contre l’arrêté préfectoral de juillet 2017. La procédure est toujours en cours.

La réplique des agriculteurs

Un faux procès pour Jean-Yves Chauveau de l’UDSEA. « On parle de fossés qui n’ont pas d’eau l’été et qui servent surtout de désengorgement des excès d’eau l’hiver, une saison où il n’y a pas de traitement ». Et l’agriculteur de préciser « Le nouvel arrêté a ajouté 530 km supplémentaires de cours d’eau protégés. Ils s’ajoutent aux 2600 km de cours d’eau où depuis 2006 les agriculteurs ont mis des bandes enherbées pour les protéger. »

Pourtant pour la Sepant, enlever ces fossés et petits ruisseaux pose problème, « il y a des produits à la surface du sol, au printemps il y a encore des pluies et des traitements également. » Quant aux km de bandes enherbées évoquées par l’UDSEA, la Sepant de valider le processus mais d’expliquer qu’elles correspondent seulement « aux cours d’eau continus, pas aux autres. »

La Préfecture a de son côté finalement publié un communiqué ce jeudi après-midi pour expliciter sa position. On peut y lire : « le choix a été fait de retenir dans un périmètre de 350m à partir de la limite amont des cours d’eau, afin d’assurer une zone tampon. » La Préfecture y reprend également l’argument de l’UDSEA comme quoi ces fossés font « l’objet d’écoulements intermittents et principalement hivernaux en dehors des périodes d’application des produits phytosanitaires. »

Photo : Image d’illustration

 Mathieu Giua

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