Blocus, sit-in et AG : avec les jeunes tourangeaux opposés à la loi Travail

Ils étaient plusieurs centaines à manifester ce jeudi.

Ca a commencé très tôt ce jeudi matin : vers 7h, des dizaines de lycéens se sont rassemblés devant Grandmont, le plus grand lycée de Tours. Ils en bloquaient l’entrée, ne laissant passer que les élèves qui avaient des examens comme des TPE (Travaux Personnels Encadrés en 1ère, et qui comptent pour le bac). A Balzac et aux Tanneurs, ça bloque aussi, il y a des poubelles devant les portes. Plusieurs dizaines d’élèves. Mais à Descartes, rien de vraiment sérieux.

A 10h, changement de plan : les jeunes rejoignent le centre-ville pour manifester auprès des retraités (dont les revendications se retrouvent brouillées). Ils sont plus de 1 000. A la mi-journée, il en reste environ 150 Place Anatole France, assis sur le bitûme et les rails du tramway. La circulation est interrompue, la situation calme. Ce que les manifestants demandent c’est la possibilité de se réunir dans un amphi de la Fac des Tanneurs, totalement fermée par la direction de l’université.

En début d’après-midi, le président Loic Vaillant a reçu une délégation et proposé une suspension des cours aux Tanneurs ce vendredi, avec également l’organisation d’une nouvelle réunion dans l’après-midi pour évoquer les mesures à prendre en cas de poursuite du mouvement en début de semaine prochaine. Une organisation validée par acclamation. Et vers 14h15, la Place Anatole France a été rendue aux voitures, les jeunes se dirigeant vers l’Esplanade des Tanneurs avec des pâtes et du riz apportés par quelques-uns. Les banderoles se préparent, quelques drapeaux de la CGT ou de Solidaires traînent ça ou là. Mais c’est surtout de manière indépendante que lycéens et étudiants ont organisé leur riposte contre la loi El Khomri. Bien que certains ne soient pas des novices de la manif’.

“C’est notre avenir”

“Avec cette loi les travailleurs auront moins de droits, les licenciements seront plus simples. Les entreprises pourront nous prendre et nous jeter comme des pions. Donc si on manifeste, c’est pour notre avenir et nous demandons le retrait total du texte” nous explique un premier groupe qui discute sur la route. Un peu plus loin, on échange avec des lycéens de Paul-Louis Courier : “cette loi ne parle pas des jeunes mais d’ici 3-4 ans c’est nous qui seront sur le marché du travail, et d’autres dès l’an prochain quand ils seront apprentis, voilà pourquoi nous nous sentons concernés. Avec l’augmentation du temps de travail, on retourne en arrière.” Un des ados nuance légèrement : “je suis pour plus de flexibilité sur le marché du travail, mais pas celle-là. Il ne faut pas déséquilibrer les relations entre les patrons et les salariés.”

“Il faut prendre notre avenir en main” complète un des porte-parole du mouvement, un étudiant. Lui, il s’inquiète de la possibilité de semaines pouvant atteindre les 60h. N’est-ce pas déjà une réalité pour certains salariés ? “Peut-être mais, justement, ça ne devrait pas être comme ça. S’ils le font c’est sous pression. Il vaudrait mieux avoir deux personnes qui travaillent 30h ou 32h. Le code du travail est là pour protéger les salariés, il n’a pas besoin d’être simplifié.” Le jeune homme dénonce également une “surtaxe” pour les pME, en opposition “aux grandes entreprises qui ont les moyens de s’exiler dans des paradis fiscaux.”

“Hollande a du courage de proposer cette loi”

Elève en 1ère S à Descartes, Louise explique avoir obtenu l’accord de son proviseur pour aller expliquer ce que prévoit le texte dans les classes, pendant les cours. Une loi qu’elle a lu en intégralité et dans laquelle elle reconnait quelques avancées comme la possibilité offerte aux pères de prendre plus facilement des congés parentaux. En revanche, de nombreux points la font bondir comme les nouvelles règles autour des heures supplémentaires : “il y a de bonnes choses mais si c’est pour se faire exploiter en échange ce n’est pas possible.” Et elle regrette que ceux qui ont déjà un travail ne se sentent pas assez concernés…

Un peu à l’écart du cortège, nous abordons également deux étudiants en droit. Et ils ne comprennent pas leurs camarades : “cette loi sera utile, nécessaire. Mon frère a 21 ans et il est autoentrepreneur. Aujourd’hui, il ne peut pas recruter. Mais le texte lui permettrait d’embaucher plus facilement, avec moins de craintes en cas de difficultés économiques. Mais ça ne veut pas dire pour autant qu’il va licencier.”

Leur opinion : “quoi qu’il arrive nous sommes dans un monde libéral dans lequel la France prend du retard. François Hollande a beaucoup de courage de lancer cette réforme. Avec un gouvernement de droite, il y aurait eu des grèves pendant un mois. Seul un gouvernement de gauche peut espérer la faire passer. Certes, le texte n’est pas favorable au milieu de l’industrie, celui-là même qui se mobilise le plus dans la rue, mais la France a abandonné l’industrie depuis bien longtemps déjà, depuis Mitterrand. Mes jeunes ne sont pas prêts au changement et surtout pas bien informés sur tout ça. Il faut pousser les gens à être plus créatifs. De plus, on sait comment ça se passe : une fois votée, la loi sera modifiée par des lois organiques, en fonction de l’application. Elle va s’adapter.”

Olivier COLLET

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