Depuis Tours il faut prendre l’A10, traverser Monnaie puis rouler encore quelques minutes à travers champs. On arrive alors à l’INRAE de Nouzilly, un institut de recherche spécialisé dans ce qu’on appelle « les animaux de rente », c’est-à-dire les espèces qu’on élève pour leur viande, leurs œufs, leur lait, leurs capacités physiques ou encore leur laine. Bref, les animaux de la ferme.
Ici, on étudie leur comportement, on travaille à améliorer leur reproduction ou on cherche des traitements contre les maladies les plus invasives. Les travaux sont menés par une équipe de 150 chercheuses et chercheurs, épaulée par l’Université de Tours ou le CHU. Le rythme est effréné : environ 400 publications par an dans des revues scientifiques. Ainsi, c’est grâce à l’INRAE de Nouzilly qu’on sait que les poules ont des émotions, que les chevaux savent reconnaître un humain stressé ou qu’on est capable de faire passer une IRM à un mouton sans l’endormir.

En 2025, l’institution fête ses 60 ans. Petit cours d’histoire : elle est née d’une décision prise dans les années 1960, quand l’Etat a choisi de transférer une partie de ses activités de recherche animale en Auvergne et en Centre-Val de Loire. Célèbre en Touraine, la famille de l’ex-premier ministre Robert Debré vend alors une immense propriété de 575ha. De quoi créer la plus grande ferme d’Indre-et-Loire, adossée à des laboratoires.
C’est donc bien sur une exploitation agricole qu’on se trouve. Sur les 600 employés, près de 400 ont des métiers centrés sur la culture, l’élevage ou le soin des animaux. Autour de nous, des tracteurs transportent le fourrage : 300 tonnes de paille et 100 tonnes de foin produites sur place (auxquelles s’ajoutent 10 tonnes de granulés venues de l’extérieur, depuis l’incendie de leur outil de production en 1998).

En arrivant, on entend les ânes depuis le parking ; il y a aussi 350 chèvres, 3 000 moutons, des poules, 120 poneys et chevaux, et même des cailles. Les vaches laitières produisent, chacune, 12 500 kg de lait par an, vendus à une entreprise du Loiret. « On était seulement à 3 500kg annuels quand on est arrivés » se félicite le directeur Marc Guérin, en poste depuis 4 ans. Pour faire rentrer un peu d’argent, on vend aussi les chevaux âgés : 600 à 900€ pour une bête de 13 ans, proposée aux clubs équestres ou à des particuliers après une sélection rigoureuse. A certains moments de l’année, les employés peuvent acheter des œufs en circuit ultra court.

Au total, le budget de l’INRAE de Nouzilly c’est 62 millions d’€ par an. A peine 6% du budget total que la France dédié à la recherche animale. Mais 10% du parc immobilier avec près de 300 bâtiments : 155 000m² de locaux « très énergivores » mais dont la consommation énergétique « a été réduite d’un tiers en deux ans » avance Marc Robin qui rassure aussi : « Nous avons un comité d’éthique présidé par une inspectrice vétérinaire avec des scientifiques » afin de valider en amont toute nouvelle expérimentation animale. Par exemple, pas question d’utiliser plus de spécimens que nécessaire lors de l’engagement d’un programme.
Car l’objectif est bien de faire des expériences pour, au final, améliorer l’efficacité des fermes françaises, éviter des maladies ou mieux comprendre ce que ressentent les animaux (et améliorer leurs conditions de vie).

Tout cela, vous pourrez le découvrir ce dimanche 25 mai lors de portes ouvertes exceptionnelles avec visite du site toutes les demi-heures en petit train aux côtés des animaux. L’occasion de voir l’enclos des chevaux avec ses ventilateurs anti-canicule ou les brosses automatiques qui permettent aux animaux de se gratter en illimité. Il sera également possible de pénétrer dans les labos, au plus près des microscopes et de l’IRM qui a déjà vu passer un tigre ou des hyènes du Zoo de Beauval lors d’examens médicaux.
Du sérieux et des anecdotes, donc, au cours d’une journée d’animations gratuites de 10h à 18h. Des jeux sont prévus pour les enfants.
Olivier Collet