Frédéric Augis : « je veux qu’on puisse s’épanouir à Joué-lès-Tours »

Deux ans après son élection, le maire Les Républicains de la 2ème ville du département se dit aux commandes d’une cité « hybride » qu’il veut voir « peser de tout son poids. » Interview fleuve.

Frédéric Augis n’est pas un adepte de la communication. D’un naturel méfiant à l’égard de la presse, le maire de Joué-lès-Tours se fait souvent remarquer par son discours cash : il attaque sans prendre de gants et peut avoir la rancune tenace. Mais il soigne aussi l’image d’un homme à l’écoute, attentif. Au point d’insister sur le fait que nombre de ses actions proviennent d’idées d’habitants ou de collaborateurs. Des coups de foudre à mettre en application tout de suite quitte à bousculer son programme mais surtout lui redonner du peps.

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Depuis votre arrivée à la mairie il y a deux ans, qu’est-ce qui a changé ?

Je pense que l’on a remis la ville en marche avec un ticket gagnant : les politiques et les administratifs travaillent ensemble. Je ne peux pas faire le programme seul. Il faut des collaborateurs qui sont avec nous dans la démarche. Les relations étaient compliquées avec les équipes. En mars 2014, il n’y’avait plus de Directeur Général des Services depuis 22 mois, plus de directeur de la communication, plus de directeur de cabinet ni de la politique de la ville. Nous en avons recruté.

Et puis ce qui est Important pour nous c’est de mener des actions à court terme, à moyen terme et à long terme. Le court terme c’est une ville propre, de nouvelles places de parking en centre-ville et l’audit sur les caméras de vidéosurveillance. Le moyen terme c’est la relance du commerce. Et le long terme c’est la politique foncière, la révision du Plan Local d’Urbanisme (PLU) et l’état des lieux des zones économiques avec Tour(s)Plus.

« On ne cherche pas à rivaliser avec Tours »

Est-ce que Joué-lès-Tours est à la hauteur de son statut de deuxième ville du département ?

On a toujours été une ville hybride. Nous étions soit la grande sœur de St Pierre, Chambray ou St Cyr soit la petite sœur de Tours. Moi je pense Joué-lès-Tours : une ville qui a des atouts, une belle endormie qui se réveille. Un exemple : on ne parlait plus assez de l’Espace Malraux. Pourtant avec ses 1 000 places il n’est en concurrence avec personne. C’est pile entre le Vinci et des salles comme Yves Renault à Chambray. Il faut arriver à trouver nos spectacles. Il y a une demande et une offre. C’est ça aussi remettre la ville en marche.

On ne cherche pas à rivaliser avec la ville centre. Nous ne sommes pas dans la compétition mais dans la complémentarité et mes collègues maires en ont pris conscience. On aura toujours du travail, on ne peut pas rattraper 19 ans comme cela. Mais je pense que l’on a déjà repris une place que nous n’avions plus dans l’agglo.

De quoi avez-vous encore envie d’ici 2020 ?

Simplement d’appliquer le programme pour lequel les gens nous ont fait confiance. Nous prenons appui sur le conseil des ainés, de quartiers et des enfants. Ils disent les choses avec un côté pur et c’est important d’écouter les Jocondiens. Un exemple : la chaufferie biomasse. Elle n’était pas prévue dans le programme et l’idée est venue d’une collaboratrice que l’on avait embauchée comme stagiaire au service développement durable et que l’on avait remerciée après avoir fait tout le travail. Elle est venue me voir en me demandant où était le développement durable dans mon programme. Je lui ai dit que c’était au quotidien, elle m’a donné des idées dont la chaufferie biomasse, et aujourd’hui c’est la responsable du service.

Cette chaufferie construite sur le site Michelin permettra d’éliminer un certain pourcentage de notre consommation d’énergie fossile, 7 600 logements en bénéficieront en 2018, 17 personnes y travailleront dont un emploi en apprentissage. C’est un projet à 16 millions d’euros avec 6 millions de rénovation de nos réseaux de chauffage car dans cette ville on doit encore couper le chauffage et l’eau chaude pour certains habitants pendant une semaine chaque année pour purger le matériel. C’est enfin une action pour le pouvoir d’achat car la TVA ne sera plus à 20% mais à 5%.

Repenser les entrées de ville.

Votre opposition vous reproche d’acheter beaucoup de terrains et de locaux sans avoir de projets. Expliquez-nous pourquoi vous faites cela ?

L’opposition ne regarde pas ce qui se fait autour de nous. Chambray construit un nouveau quartier… dont les terrains lui appartiennent. La ZAC du Plessis de La Riche, c’est aussi des achats fonciers. Toutes les villes font des acquisitions pour prévoir l’avenir. Nos achats fonciers sont sur les boulevards, le cœur de ville et les entrées de ville comme à côté de la station Pont Volant du tram. A cet endroit, on a la chance extraordinaire d’être à l’entrée de la Loire à Vélo et nous sommes en train de négocier avec Tour(s)Plus afin d’aménager un pont sur le Petit Cher pour la rattraper. Et si en plus à cet endroit-là on fait un parking, alors on aura une cohérence, une entrée de ville avec un charme que l’on n’a pas aujourd’hui.

Quels sont vos souhaits en matière d’immobilier et d’architecture ?

Il faut respecter les cohérences des quartiers. Que les zones pavillonnaires restent telles quelles, qu’on ne vienne pas construire un bâtiment de 4 étages juste à côté. S’il faut densifier, cela ne doit pas se faire au détriment des riverains mais en concertation. C’est pour ça que l’on va faire évoluer le PLU ce qui va encore prendre un an. Mon prédécesseur faisait tout et n’importe quoi pour augmenter la population. Moi ce n’est pas le chiffre qui m’intéresse mais que si l’on atteint les 40 000 habitants ils soient heureux. Il ne faut pas que Joué-lès-Tours soit une ville dortoir mais une ville où l’on s’épanouisse. Et quand on sera plus ouverts, les gens viendront s’installer.

La Rabière va bénéficier des crédits de l’Etat via l’ANRU pour sa rénovation…

L’ANRU va nous aider en apportant des crédits pour la vieille Rabière. Mais il ne faut pas seulement travailler là-dessus. Ni que sur La Rabière. Je regrette que la Vallée Violette et le Morier soient sortis des aides à la politique de la ville. On n’y vit pas mieux qu’à La Rabière. Heureusement, Val Touraine Habitat va quand même faire des travaux au Morier.

Il faut aussi travailler sur l’humain. La première chose qu’il manque à La Rabière c’est du travail. Donc il faut valoriser nos Jocondiens dans les entreprises créées sur la ville, par exemple pour la chaufferie biomasse. Rien que sur le chantier de construction, il y aura 4 000h pour l’insertion. Le Leclerc qui doit s’installer aux Courelières, c’est un magasin qui va passer de 80 à 225 salariés : ce sont autant d’opportunités.

« La police municipale sera plus présente sur les marchés. »

Comment renforcer la médiation et l’accompagnement dans les quartiers d’autant que le Conseil Départemental réduit son investissement dans ce domaine sur la ville, suite au retrait du Morier et de la Vallée Violette du plan de politique de la ville…

J’ai un travail constant d’échange et de parole avec les habitants. Contrairement à ce que dit l’opposition, les médiateurs de rue n’ont pas disparu. Avant il y avait ceux qui étaient dans les rues et les stadiers avec un grillage entre les deux. J’ai trouvé plus cohérent qu’ils soient remis ensemble. Souvenons-nous du contexte de création de ces médiateurs : au lendemain de l’incendie de 200 voitures on a balancé 6 gamins dans l’urgence pour ramener la paix. A l’époque ils étaient en plus embauchés avec des contrats précaires que l’on n’a pas voulu renouveler mais aucun poste n’a été diminué.

Concernant la poursuite de l’accompagnement, je ne suis pas inquiet. Aujourd’hui il y a un dialogue tripartite entre l’APSR (qui gère les médiateurs, ndlr), la ville et le département. On trouvera une solution humaine car il y a une tradition jocondienne de plus de 40 ans et ça ne va pas s’arrêter demain.

A quoi vont servir les nouveaux policiers municipaux recrutés ?

La sécurité c’est la première des libertés. J’ai pris l’engagement de doubler les effectifs de la police municipale, une police de prévention et de proximité. Nous avions 22 agents et on me dit que c’est beaucoup. Mais non : quand on met trois personnes dans une voiture, entre les vacances, les récupérations… ça ne fait pas tant que ça sur le terrain. Il va donc y avoir plus de patrouilles pédestres et à vélo, une présence récurrente sur les lieux de vie des Jocondiens. Avec 5 agents de plus dès cette année, on sera sur tous les marchés pour réguler la circulation quand les personnes seront mal garées. Cela pourra aussi rassurer les populations plus âgées. Je ne veux pas concurrencer la police nationale mais avec 153km de voirie, 34km² à couvrir, ça me semble intéressant de proposer cela.

Plusieurs pistes pour le site Michelin.

Pouvez-vous détailler votre plan de développement de la vidéosurveillance ?

Nous avons une dizaine d’installations de caméras en projet qui doivent encore être validés par la préfecture. Pour déterminer les emplacements, nous faisons un travail avec les conseils de quartiers, on écoute leurs demandes. C’est pour cela que l’on a mis trois caméras Rue Gamard où les riverains signalaient des problèmes. Mais c’est juste un élément de plus, comme les voisins vigilants. Il faut pouvoir se doter de toute la batterie de dispositifs possibles. Je n’ai pas dit que c’était la solution miracle mais c’est une possibilité pour se sentir plus en sécurité. Et d’ailleurs, je me sens plus fliqué dans certains magasins que quand on met une caméra devant une école.

Quel est l’avenir du site Michelin ?

Il faut une revitalisation la plus rapide possible, remettre de l’emploi. Il y a 24ha qui vont être remis à nus. Il faut que demain des projets économiques permettent aux Jocondiens de trouver de l’emploi. On a plusieurs pistes, de belles pistes. 24ha à côté d’un périphérique, à dix minutes d’un aéroport… ça intéresse des entreprises. Associer le nom de son entreprise à Joué-lès-Tours c’est quelque chose qui a du potentiel. Je vais aussi recevoir prochainement les syndicats qui ont un projet pour le site autour de l’aéronautique.

« La métropole va nous permettre d’être leaders »

Certains sites de la ville comme le Lac des Bretonnières ou l’Espace Malraux sont très difficilement accessibles en transports en commun. Est-ce que ça peut changer ?

Nous subissons une délégation de service public qui court jusqu’en 2017. Dans le cadre de ma vice-présidence de Tour(s)Plus sur les transports, j’ai demandé à l’ensemble de mes collègues maires de faire des plans de prospectives pour savoir ce qu’ils veulent demain pour les transports. Et en tant que maire de Joué-lès-Tours, sur des lieux comme les Bretonnières, ce serait bien que l’on ait une offre plus facile pour qu’un certain nombre de populations puisse s’y promener dans des conditions meilleures. Et ce sera plus facile pour les Bretonnières que pour Malraux parce qu’il faudrait créer une navette nocturne pour les événements le soir. On réfléchit aussi pour faire circuler le tram plus tard en rapport avec Le Temps Machine mais déjà, le 21 juin, il circulera toute la nuit comme pour le Nouvel An.

Le lac des Bretonnières a désormais sa passerelle, sa zone de baignade, son accrobranche… Ce n’est qu’un début ?

On va en partie le mettre en lumière dès cette année pour les gens qui courent, refaire des places de parking autour et on va installer un revêtement pour éviter les trous. Un restaurant panoramique va également ouvrir dans quelques mois. Un Jocondien est venu me proposer ce projet un jour : c’est fou mais bien. C’était d’ailleurs la même chose pour la passerelle : un collaborateur qui me l’a proposé. J’ai trouvé ça tellement lumineux que j’ai dit « banco, on y va. »

Quel bilan faîtes-vous des premières semaines du nouveau centre aquatique Bulle d’O ?

C’est à l’image de ce que j’attendais. Il y a un certain nombre de choses mal évaluées comme la hauteur d’eau pour faire de l’aquagym. Mais globalement je suis très heureux car cela amène de la complémentarité avec les centres de La Riche et Tours. On a réussi le défi de faire entrer à la fois les associatifs et le grand public dans un équipement qui a évolué. Ca va devenir un des centres aquatiques référents en Indre-et-Loire.

Vous venez de vous prononcer favorablement pour une transformation de la communauté d’agglomération de Tours en métropole. Concrètement, qu’est-ce que ça va changer pour les Jocondiens ?

La métropole c’est la plus belle chose qui puisse arriver à Joué-lès-Tours. C’est plus de proximité avec plus de moyens. Ca va nous permettre d’être leaders en économie, de créer de la richesse, de l’emploi, de développer les universités… On est aux portes de Tours donc nos enfants vont pouvoir trouver des formations et éviter d’ailler à l’autre bout du pays. Ce sera un confort quotidien. La métropole, ce n’est pas une technostructure c’est permettre de vivre mieux, d’anticiper les problèmes de demain. Joué-lès-Tours va y peser de tout son poids.

Propos recueillis par Olivier COLLET

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