« Les Français sont des hommes et femmes politiques qui s’ignorent »

Une association propose plus de référendums ou une réforme du Sénat pour dynamiter la politique dans une « France ingouvernable ».

Alors que les candidats à la présidentielle proposent l’édification d’une Vième République avec une nouvelle constitution, une moralisation de la vie publique, plus de proportionnelle ou la création un « 49-3 citoyen » pour permettre au peuple d’imposer des lois au parlement, une jeune association à visée politique veut aller beaucoup plus loin dans les réformes institutionnelles, et a même constitué un programme de député exclusivement centré sur ces questions pour soigner une maladie hexagonale : le dégoût de la politique entraînant l’abstention massive.

Créée fin 2016 en région parisienne, A Nous la Démocratie a un représentant en Touraine : Emmanuel Bonin (non candidat aux législatives, mais d’autres ont franchi le pas en Île de France). Ex encarté socialiste, ce jeune homme de 35 ans qui a toujours « voté contre et jamais par enthousiasme pour un candidat » veut « renforcer la démocratie. On pense que pour résoudre la crise politique française, il faut se concentrer sur l’institution. Les problèmes économiques ou sociétaux ne seront réglés qu’à condition de faire plus participer les citoyens dans le processus décisionnel. » Il part d’un constat un peu fataliste et exagéré mais loin d’être irréaliste :  « la France est ingouvernable car dès qu’une réforme est proposée, il y a des manifestations. Beaucoup pensent que le président n’a pas plus de légitimité qu’eux à prendre une décision. »

Selon Emmanuel Bonin, la solution résiderait notamment dans l’organisation de plus de référendums, se basant sur le modèle suisse ou américain : « on oublie qu’au moment de la présidentielle en Californie, il y avait aussi 18 référendums sur l’éducation, l’abolition de la peine de mort, l’augmentation du prix des cigarettes… Là bas ça fonctionne très bien alors que le pays est moins politisé que la France. » « Les Français ont des avis très aboutis et intéressants sur la plupart des sujets, c’est une raison de leur donner plus d’occasions de s’exprimer. Ce sont des hommes et femmes politiques qui s’ignorent » plaide encore l’animateur de l’association en Indre-et-Loire

Et rien qu’avec plus de scrutins sur des questions précises, le jeune homme croit que l’on pourrait « régler des questions qui trainent dans le débat public depuis 30 ans. » L’idée – également avancée par des candidats à la présidentielle – qu’une pétition recueillant 500 000 signatures puisse faire l’objet d’un référendum. Autres propositions : « assurer un renouvellement de la représentation politique à travers un seul mandat, et pas plus de deux mandats consécutifs. » Avec ce raisonnement, fini même les députés qui restent conseillers municipaux, par exemple. « Il faut dé-professionnaliser la vie politique, empêcher d’y faire carrière comme Philippe Briand élu en Indre-et-Loire depuis 1983 ou Hervé Novelli depuis 1986. On refuse aussi le parachutage en imposant une résidence réelle dans la commune où l’on se présente depuis au moins 5 ans. » En parallèle, l’idée serait de pouvoir former les représentants politiques et d’assurer leur avenir après coup.

A Nous la Démocratie veut aussi dynamiter le fonctionnement du Sénat en le remplaçant par une assemblée de Français tirés au sort. On pourrait aussi voir la création d’un 49-4, un article obligeant un gouvernement à mettre en jeu son avenir devant le peuple via un vote : « car son rôle est d’expliciter sa loi pour que tout le monde la comprenne. » Car c’est notamment pour ça que la loi Travail a subi une telle fronde, selon Emmanuel Bonin qui défend enfin une véritable indépendance pour la Cour de Justice de la République (c’est-à-dire sans élus qui y siègent, remplacés par des citoyens), « car ses jugements sont biaisés par la présence des élus » dit-il en repensant à la condamnation de Christine Lagarde, coupable mais dispensée de peine.

Ce big bang institutionnel et cette perspective de référendums multiples risqueraient de créer un climat de tension encore plus fort en France, avec un esprit de campagne permanent déjà existant mais encore accentué. Ce n’est cependant pas l’avis d’Emmanuel Bonin : « aujourd’hui, ce qui hystérise les débats c’est qu’ils ne sont pas tranchés depuis 20, 30 ou 40 ans. » Pour en débattre, il organise une rencontre avec les fondateurs d’A Nous la Démocratie ce samedi 25 mars à 16h30 au 1er étage de la brasserie Le Bord’Ô, 17 Rue de Bordeaux à Tours.

Olivier COLLET

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