Visite de ce qui est sans doute la plus petite galerie d’art de Tours et rencontre avec celui qui l’anime, un homme qui a l’œil fin.
Il fait un peu noir dans le Vieux-Tours, les pavés sont mouillés, on tâtonne pour trouver l’interphone, on monte deux étages d’un bel immeuble puis l’ambiance change. Nous voici dans un appartement qui, à première vue, ressemble au mien ou au vôtre. Petite entrée, salon d’une quinzaine de mètres carrés, couloir, cuisine. La lumière est chaleureuse, le mobilier soigné, il y a un livre de la collection « Les Nuls » dans la bibliothèque et, quand on regarde aux murs, on se dit que celui qui habite ici a du goût pour la déco artistique. En même temps il vaut mieux…
Voilà deux ans et demi qu’Hugues Ménard a ouvert ici le cabinet d’art qui porte son nom. Hérité d’une ancienne tradition de l’Ancien Régime, ce concept de « galerie à domicile » est particulier et déroutera malheureusement les plus timides : il faut réserver et sonner à sa porte pour découvrir la demi douzaine d’expositions qu’il organise chaque année dans son salon, dans ce même endroit où il reçoit ses amis ou fume ses cigarettes. Le concept a un gros avantage : pour le locataire des lieux, il change régulièrement d’ambiance intérieure. L’inconvénient de recevoir beaucoup de monde, c’est bien sûr que le ménage doit être irréprochable.
Hugues Ménard sait recevoir : il y a toujours un café chaud ou un vouvray frais pour l’amateur de curiosités, ce jour-là des dessins graphiques de François Pagé. Le lieu étant de taille modeste, évidemment, les oeuvres qui y sont accrochées ne sont pas très grandes. Mais la mise en scène, la lumière, aide facilement à se projeter : « tiens, celle-ci irait bien chez-moi… ». Hugues Ménard ne joue pas uniquement à domicile. Le métier de cet ancien agent immobilier de St-Cyr-sur-Loire qui a quitté son ancienne vie en 2010 pour ses 40 ans est agent d’artiste. Comme pour un footballeur, sa mission est de leur trouver des lieux d’exposition. « A Tours, je pense être le seul à faire ça » nous explique-t-il.
Une expo by Hugues Ménard bientôt en Asie ?
Le quadra s’occupe ainsi principalement de 4 artistes, sa « troupe », plus quelques autres plus ponctuellement. Et ça l’amène un peu partout. Jusqu’au 5 janvier, il fait exposer les peintures de Marie Gillet au Comptoir Italien de la Place de la Résistance. En décembre, il inaugurera une exposition au coeur du nouveau bâtiment d’EDF – Le Gallion – aux Deux Lions et il est même en très bonne voie pour organiser des expositions de ses artistes fétiches en Asie : la Chine ou le Japon.
Là bas ce sera sûrement dans des galeries, mais Hugues Ménard aime l’insolite : un magasin de déco, une chapelle ou, donc, un restaurant Tourangeau. Très sociable mais très attaché à son indépendance voire aspirant à une certaine tranquilité, il fonctionne à l’affect, « il faut que la personne me convienne et que son art me parle ». Cet autodidacte curieux, passionné de cultures, passé en FAC de droit, s’est épanoui dans cette nouvelle vie exigeante (il est tout le temps invité partout, assiste aux vernissages, part en voyage…) et affirme qu’il n’a jamais été aussi « libre » que maintenant.
Que personne ne le croit perché sur son nuage pour autant : Hugues Ménard nous explique défendre l’idée d’un art accessible à tous, racontant notamment comment il a vendu sa première oeuvre à la vendeuse d’une boulangerie, se disant ravi de céder des tableaux ou des dessins à des jeunes, parfois pour 15, 30 ou 40€. « Quand on achète une fois de l’art, on prend le virus », voilà ce qui pourrait être sa devise. C’est sûr, il a été contaminé et ne chercherait à se soigner pour rien au monde.
Olivier COLLET
La prochaine expo « à domicile » d’Hugues Ménard débutera le 4 décembre avec l’accrochage des oeuvres d’Eric Demetis. Pour rester informé, il y a sa page Facebook ou son numéro de téléphone : 06 60 19 32 06.
