Alerte cliché : les garçons ne lisent pas les livres aux couvertures roses

L’adjointe à la culture de Tours a critiqué la couleur d’un livre pour lequel elle remettait un prix. Malaise.

A l’occasion de l’ouverture des Assises du Journalisme ce mercredi au Vinci, la Ville de Tours a remis deux prix pour deux livres écrits pour des adolescents. Alpha, Abidjan – Gare du Nord de Bessora et Barroux (éditions Gallimard) a été récompensé dans la catégorie 15-18 ans et Malala pour le droit des filles à l’éducation de Raphaële Frier et Aurélia Fronty (éditions Rue du Monde) a été choisi par le jury dans la catégorie 10-14 ans. Ce livre raconte l’histoire d’une jeune pakistanaise qui s’est battue pour aller à l’école, qui a failli mourir pour ça, et qui a obtenu un Prix Nobel de la Paix.

Invitée à s’exprimer au moment de la remise du prix, l’adjointe à la culture de Tours en a profité pour critiquer le choix de l’éditeur pour la couverture : un dessin à dominante rose. Christine Beuzelin a estimé que cela pouvait poser problème aux garçons, que ça n’allait pas les inciter à le lire, qu’il aurait mieux valu que cette couverture soit bleue… Oui, elle a vraiment dit ça. Alors, ok, peut-être qu’il y aura vraiment des jeunes garçons qui vont refuser de lire ce livre parce que sa couverture est rose. Ils ont tort. Mais à la rigueur ce n’est pas ça le problème. Le problème Mme Beuzelin, c’est qu’aujourd’hui il y a encore des adultes qui réfléchissent comme ça : le rose, c’est pour les filles, et seulement pour les filles.

Eh bien non Mme Beuzelin, le rose ce n’est pas féminin. Je suis un garçon, et dans mon armoire il y a deux polos roses. Quand je les porte, je n’ai pas l’impression de me travestir. Avec, je me sens sexy, point barre. D’ailleurs je vais peut-être en porter un lors du prochain conseil municipal… Par ailleurs, quand j’étais plus jeune, je dévorais les romans de la Bibliothèque Rose, Le Club des Cinq et compagnie. Parce que ces romans me passionnaient. La couleur de leur couverture m’était indifférente, en plus il parait que je suis un peu daltonien.

Ma filleule va naître dans quelques semaines. Je vais peut-être lui acheter des vêtements roses, s’ils me plaisent. Mais je vais aussi lui offrir du bleu, du jaune, du vert, du orange… Quand elle sera plus grande, nous jouerons ensemble à des jeux de construction, à la dinette, aux petites voitures ou à la poupée. Puis je l’emmènerais voir des spectacles de danse ou des matchs de rugby (au fait, ils sont de quelle couleur les maillots de l’équipe du Stade Français ?). Elle lira ce livre sur Malala et aussi Chair de Poule, Harry Potter ou Game of Thrones. Et si mon amie attendait un garçon, j’aurais écrit exactement le même paragraphe.

Mme Beuzelin, si aujourd’hui des petits garçons refusent de lire des livres dont la couverture est rose, c’est parce que leurs parents, les adultes, ont été conditionnés dans un monde sexiste et bicolore et qu’ils perpétuent cette fichue tradition. Comme vous l’avez fait publiquement à la tribune ce mercredi, alors que la municipalité pour laquelle vous êtes élue était toute fière d’inaugurer un stand baptisé « Stop aux clichés sur les jeunes » à quelques mètres de l’estrade où vous avez prononcé ces mots. Vous ne trouvez pas qu’il y a comme un paradoxe ?

Olivier COLLET

PS : au fait, la couverture de Malala pour le droit des filles à l’éducation peut être vue comme un écho à celle du livre écrit par Malala Yousafzai, Moi, Malala je lutte pour l’éducation et je résiste aux talibans (chez Calman Lévy), illustré par une photo de la jeune femme… habillée de rose. Cela dit, et parce qu’il ne faut évacuer aucune possibilité, peut-être que cette couverture a été pensée ainsi : « c’est un livre sur une jeune fille alors on va l’illustrer avec du rose. » Et alors là, on est d’accord, il y a matière à débat.

Précisions sur à cet article à lire ici.

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