« On a le sentiment qu’il faut que l’on fasse plus nos preuves… »

Nous avons assisté à la table ronde organisée par le préfet d’Indre-et-Loire pour la journée des droits des femmes.

« On résume trop souvent la journée du 8 mars à la lutte contre les violences faites aux femmes » souligne le préfet d’Indre-et-Loire Louis Le Franc en s’asseyant au milieu d’une dizaine de femmes réunies à la préfecture de Tours à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes ce mardi. Cadres de l’administration, chef d’entreprises ou responsables d’associations, elles ont été conviées car leurs parcours sont singuliers, parce que leurs témoignages apportent un éclairage intéressant sur notre société.

Et pourtant, comment ne pas être mal à l’aise avec le fait qu’en 2016, alors que l’on parle d’égalité depuis des années, on ait encore besoin d’organiser ce type d’événement pour faire avancer les mentalités ? Responsable du Pôle Régional Ingénérie de la SNCF à Tours, Estelle Libourel a d’ailleurs mis les pieds dans le plat : « il ne devrait pas y avoir du sujet de Femme ou d’Homme. On ne devrait plus avoir ce genre de discussion. » Et pourtant, les inégalités, elle y est confrontée au quotidien : dans son secteur, il n’y a que 12% de femmes. « Les hommes avec qui je travaille ont reconnu qu’avoir des femmes dans l’équipe apportait une certaine ouverture. Mais c’est seulement à ce moment-là que j’ai pris conscience que je représentais une ‘anomalie’. »

Dans la pièce, le mot fait réagir. Mais voilà, c’est un fait, aujourd’hui les femmes sont encore plus nombreuses à devoir apporter la preuve de leurs compétences pour avancer dans le monde du travail. « Bien souvent, aux réunions, je suis la seule femme chef d’entreprise autour de la table. Notre entreprise est une structure familiale et il y a eu des moments difficiles avec les hommes. Il faut gagner sa légitimité » raconte Catherine De Colbert, codirigeante de la cartonnerie Oudin et vice-présidente de la Chambre de Commerce et d’Industrie qui reconnait néanmoins qu’en 15 ans « les regards ont évolué. »

Directrice de l’unité départementale de la DIRRECTE 37 (structure en charge de l’emploi), Martine Bellemere-Baste a aussi ressenti les inégalités et les préjugés dans la fonction publique : « quand j’ai commencé j’étais la seule femme inspectrice du travail et auparavant il n’y avait que 8 femmes sur 63 élèves dans ma promotion. » Elle se souvient aussi de cette phrase, cruelle : « on a nommé des femmes… mais elles sont compétentes. » Des « anecdotes » comme celle-ci, elles en ont toutes en réserve. Un autre exemple ? Les blagues graveleuses, en public, et quand une femme leur fait une remarque : « ah non mais toi c’est différent ! » Allez avaler la couleuvre…

Chrystelle Laurent-Rigowski, administratrice des monuments nationaux et en poste au Château d’Azay-le-Rideau (actuellement en rénovation) est une habituée des chantiers, et de surcroît une amoureuse du bricolage. On ne voit pas où est le problème, mais ses collègues hommes semblent avoir eu un peu de mal à s’y faire : « j’ai le souvenir de réunions où c’était difficile pour moi de parler. On m’a aussi beaucoup testée. J’ai laissé faire les premiers mois et certains essayaient de me promener jusqu’au jour où je les ai recadrés et coincés. » La morale pour elle : « les femmes ne sont pas des sujets faibles, elles savent se défendre. » Ce qui ne l’empêche pas de sentir observée avec suspiçion chaque fois qu’il faut inaugurer un échaufaudage et grimper tout en haut : « je dois dompter mon vertige car si je n’y arrive pas, on dira que c’est parce que je suis une femme. »

Olivier COLLET

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