Les derniers festivaliers sont partis ce mardi, les autorités et les propriétaires font le bilan.
Les routes de Pernay sont toutes ouvertes ce mercredi après-midi. Retour à la normale donc dans cette petite commune située à une vingtaine de kilomètres de Tours, là où 60 000 personnes (en cumulé) sont venues faire la fête pendant 4 jours à l’occasion du teknival du 1er mai, un événement techno organisé dans la clandestinité.
Encadré par les forces de l’ordre qui n’avaient pas les moyens nécessaires pour l’interdire (400 gendarmes ont tout de même été mobilisés, plus 150 secouristes dont les pompiers, le SAMU et des bénévoles d’associations), le rassemblement musical a été surveillé de près avec par exemple des contrôles systématiques des véhicules sortant du site (253 permis confisqués, surtout à cause de consommation de stupéfiants). A noter que les deux poids-lourds saisis avec du matériel de son ont été restitués.
Ce mardi après-midi, les militaires ont levé leur présence à l’exception de quelques hommes présents pour enlever la dizaine de véhicules « oubliés » sur place (ils seront placés en fourrière et verbalisés). Sur le week-end, 10 personnes ont été interpellées, surtout pour du trafic de stupéfiants. Pas de problèmes d’ordre public recensés, ni de chiens retrouvés éventrés ou de 8 personnes déclarées décédées comme le prétendent des rumeurs : « il n’y a bien qu’une seule victime et on a par ailleurs retrouvé deux chiens assoiffés et fatigués mais bien vivants » nous indique-t-on.
Mais si la foule a disparu, le teknival risque de laisser des traces pour un bon moment dans le secteur. C’est notamment le cas pour les propriétaires du terrain de 39ha sur lequel les fêtards ont jeté leur dévolu : « je n’ai dormi que 4h pendant cette nuit de lundi à mardi mais c’est déjà mieux que les 4 nuits précédentes » soupire ce mercredi une membre de cette famille : « j’ai 75 ans et je ne pensais pas voir un truc pareil. C’était affreux. »
En temps normal, elle vit à Tours et ne passe que quelques nuits dans sa maison de Pernay : « sur les 39ha de terrain nous en avons environ 27 qui sont consacrés à la culture. Ce sont des terrains en jachère, mais de la jachère entretenue. » Des champs aujourd’hui défigurés : « c’est devenu de la terre, de la boue, comme un parking. Il n’y a plus rien. Ils ont allumé des barbecues à même le sol, brûlant la terre. Les bords de l’étang sont pleins de boue… » « Tout est piétiné, en lisière de forêt c’est même impraticable à cause des excréments » souligne la gendarmerie qui note néanmoins que la surface est « relativement propre » : une trentaine de bennes à ordures ont été remplies.
Dès samedi, une plainte contre X a été déposée et une enquête est en cours pour tenter d’identifier les organisateurs du teknival : « nous avons fait venir un huissier pour constater l’occupation et il va revenir constater les dégâts ce jeudi. Des barrières ont notamment été détruites dans les champs, il y a aussi des dégâts dans les bois… En tout cas, il est hors de question que les frais de remise en état soient à notre charge. Nous espérons une prise en charge par la préfecture. »
Globalement, les propriétaires s’estiment satisfaits de la façon dont les autorités (gendarmes, préfecture, Conseil Départemental…) ont géré la situation même s’ils déplorent qu’il n’ait pas été possible d’empêcher la circulation des camions transportant les enceintes et qu’ils regrettent de ne pas avoir été prévenus plus tôt de la situation : « à l’origine on devait organiser une petite fête là-bas, un anniversaire avec 10-12 personnes, on a évidemment tout annulé. » Malgré le bruit empêchant le sommeil, ils ont veillé sur place, notamment pour garantir la protection de leur maison : « dans la nuit de samedi à dimanche, on a eu besoin des gendarmes. Les portables ne passaient pas, il a fallu prendre la voiture sur 300-400m on a vu des gens qui dormaient à même le goudron. On a mis dix minutes pour faire le trajet. »
Si la famille déplore l’état de certains participants (« on s’est inquiété pour un jeune retrouvé inconscient dans les bois, heureusement les secours ont réussi à le réanimer »), elle note bien que globalement « ils n’étaient pas virulents. » Un ressenti également formulé par les différents habitants de la commune qui soulignent le respect des teknivaliers.
Les propriétaires du terrain ne sont pas les seuls à avoir une facture à présenter. Le Conseil Départemental aussi. « Nous avons mobilisé 80 pompiers pendant le week-end ça représente 140 000€ plus 10 000€ d’autres frais » détaille le président de la collectivité, Jean-Gérard Paumier, qui a contacté le préfet d’Indre-et-Loire en lui précisant son intention de lui présenter la facture pour relais auprès du ministère de l’intérieur, sachant bien qu’il n’y a aucune certitude d’obtenir un remboursement : « ce n’est pas une manifestation mais un événement illégal qui concerne d’abord l’Etat. Il doit donc faire un effort de solidarité nationale. Ce n’est pas au contribuable tourangeau de financer le teknival. »
Olivier COLLET / Photos fournies par la famille des propriétaires.

