L’aéroport tourangeau fonctionne bien mais il a atteint un pallier. Comment peut-on le faire évoluer ?
En 2015, 187 000 passagers sont passés par l’aéroport de Tours. Et l’écrasante majorité d’entre eux étaient des clients de la compagnie Ryanair dont les vols au départ ou à l’arrivée de Tours-Val de Loire affichent un excellent taux de remplissage. Dit autrement, cela signifie que l’on ne peut pas faire beaucoup mieux en terme de fréquentation si l’offre actuelle de destinations reste inchangée (Londres, Porto, Marrakech, Dublin, Marseille). Pourtant, la vocation d’un tel équipement c’est de booster la région, d’être une véritable porte d’entrée, un aspirateur à touristes et voyageurs d’affaire prêts à sortir la carte bleue (on caricature un peu, mais pas tant que ça).
Une étude d’impact économique de l’aéroport présentée en début d’année, et établie à partir d’un sondage sur 1050 voyageurs, arrivait à ces conclusions : 30% des passagers ne sont pas de la région (17% de Londoniens, 9% de Portugais…), 6% sont des chefs d’entreprise et 16% des cadres. Parmi ceux qui débarquent à Tours, 13% viennent pour le travail et 61% pour voir de la famille, 13% logent à l’hôtel et 4% en camping, 50% d’entre eux restent ici plus de 7 jours… Au final, 72 500 nuitées en hébergements touristiques ont été réservées par des passagers arrivés en Touraine par les airs, ils ont en moyenne dépensé 55€ par jour soit au final quasiment 20 millions d’euros injectés dans l’économie locale et qui ont donc un lien avec l’aéroport. Valables pour 2013, ces chiffres n’ont aucune raison d’avoir véritablement évolué depuis puisque la fréquentation de l’aéroport est juste passée de 184 000 personnes à 187 000.
3,3 mlillions de subventions, jusqu’à quand ?
Bref, à moins que demain les rapports de forces ne s’inversent subitement et que les économes vacanciers venus voir de la famille soient remplacés par des touristes dépensiers ou des cadres dynamiques à la note de frais illimitée, on peut dire que l’aéroport de Tours a atteint son plafond de rentabilité. Avec 44 emplois directs et 159 emplois indirects, c’est un équipement largement bénéficiaire : 3,3 millions d’euros de subventions versés par les collectivités, 20 millions récupérés, ça fait un solde positif de 17 millions d’euros. « Oui ces subventions servent à financer Ryanair », assume Jacques Chevtchenko, 1er adjoint de Tours, conseiller communautaire et conseiller régional qui s’autoproclame « défenseur de l’aéroport de Tours à la région », « mais sans Ryanair, il n’y a plus d’aéroport » poursuit-il (sans trafic low cost, l’étude estime qu’il n’y aura plus de 5 000 passagers à l’année, 20 emplois directs et zéro impact économique, même si près de 200 mouvements d’aviation d’affaire sont enregistrés chaque année et que ceux-là n’arrivent pas dans un gros Boeing).
« La région a déjà un souci de taille, elle ne peut pas se passer d’un aéroport dédié au trafic de passagers » poursuit Jacques Chevtchenko, persuadé que l’offre de Ryanair répond à un besoin et qu’elle permet d’assurer la pérennité d’autres activités de l’aéroport comme son accueil de vols dédiés au CHRU de Tours : 61 mouvements en 2012, 190 en 2014, notamment pour des transplantations d’organes : « c’est crucial. Si demain ce n’est plus possible, ce sera un affaiblissement de l’hôpital. » Le souci, c’est que certains financeurs de l’aéroport ont clairement fait comprendre que leur contribution pourrait être remise en cause, en particulier la Chambre de Commerce et d’Industrie. Et pendant ce temps, les élus écologistes à la région essaient de faire passer des amendements pour réduire la subvention du conseil régional (sans parler de l’hostilité des Verts de Tours). Mais pour Jacques Chevtchenko, il n’y a pas de quoi s’inquiéter car les 4 qui paient pour l’aéroport forment une sorte de « club » avec un accord: « si l’un veut se désengager, il faut que les autres soient d’accord. »
Des avions vers l’Allemagne ou l’Italie ?
Il n’empêche qu’il faut remotiver les troupes. Et pour ça, annoncer de nouvelles destinations ce serait l’idéal (et populaire…). Selon Jacques Chevtchenko, c’est le job de SNC Lavallin, la société qui a pour mission de gérer l’aéroport… Et il nous fait comprendre qu’il aimerait bien la voir s’activer un peu plus pour faire venir des avions sur le tarmac : « il y a la nécessité d’un développement de lignes nouvelles. Régulières ou juste pour la saison. Lavallin devrait rechercher et ne pas se contenter de ce qu’il y a aujourd’hui. »
Parmi les pistes à développer selon lui : l’Allemagne ou l’Italie, qui pourraient être des marchés porteurs. Et sûrement avec Ryanair, une fois de plus : « on ne trouvera pas d’autre compagnie, même si ce serait très bien… » Car Tours est trop petit pour Easyjet, Transavia and co. Mais ça ne pose pas de problèmes à l’élu, tant que Tours retrouve une dynamique. Histoire aussi de rendre moins problématique le désengagement de l’armée qui veut déménager son école de chasse à Cognac dans les prochaines années et qui s’investira alors beaucoup moins pour la piste tourangelle… Tout est donc une question de timing et de tempo.
Olivier COLLET
Le tram jusqu’à l’aéroport ?
Au conseil régional, Jacques Chevtchenko a publiquement évoqué la possibilité d’un prolongement du tram de Vaucanson à l’aéroport, moins d’un kilomètre de rails, donc un investissement raisonnable selon lui « si le développement est plus fort. » Le souci, c’est que la zone est particulièrement marécageuse et que ça risque d’être techniquement assez compliqué. En revanche, la création d’une navette (électrique ?) entre Vaucanson et l’aéroport, 1h30 avant les décollages et 1h après l’atterrissage ferait office de bonne solution de dépannage pour faire transiter les passager chargés et leur éviter le chemin inhospitalier jusqu’à l’aérogare…