EXCLU : On a pris un cours de conduite du tram de Tours

Il est 21h30 et les trams rentrent petit à petit au centre de maintenance de Tours-Nord, situé quelques centaines de mètres après la station Vaucanson. Après le passage obligatoire dans la machine à laver pour repartir brillantes en ville le lendemain, la plupart des rames rentrent au garage… mais quelques-unes restent allumées. Elles n’ont pas fini leur travail…

Le soir venu, la base technique du tram de Tours se transforme régulièrement en centre de formation. 32 sessions ont eu lieu depuis le lancement de la ligne A, de quoi former les conductrices et conducteurs… ou plutôt les tractionnaires aux manettes sur les 15km du parcours. Légalement, on peut piloter un tramway sans avoir le permis de conduire mais l’entreprise Keolis l’exige pour exercer sur le réseau Fil Bleu. C’est elle qui se charge d’encadrer les élèves avec des cursus de 10 jours (pour des conducteurs de bus qui veulent obtenir l’habilitation tram, des étudiants formés pour les périodes de vacances ou des personnels techniques et administratifs à qui les connaissances sont utiles). Sur 510 effectifs de conduite, 130 ont les compétences pour le tram.

Des remises à jour de formation régulières

Lors de l’apprentissage, le programme est intense : cours théoriques de 14h à 22h puis session pratique jusqu’à minuit. A la fin, il est nécessaire de passer un examen, réussir des tests psychotechniques semblables à ceux des conducteurs de train (stress, logique…), subir une visite médicale (vue, réflexes moteur…) et, bien sûr, ne pas être positif à l’alcool ou aux stupéfiants lors des tests effectués par l’entreprise. Il faut également savoir qu’une fois le certificat obtenu, on est habilité pour une ligne. C’est-à-dire que l’ensemble de la brigade tram de Tours devra retourner en formation avant de conduire sur la ligne B attendue en 2025-2026. Même programme en cas de mutation sur le réseau d’une autre agglomération.

Au menu dans tous les cas : l’apprentissage de la fonction des différents boutons de la cabine mais aussi les protocoles en vigueur dans un tramway. C’est simple, quoi qu’il se passe il y a une procédure définie. Que ce soit pour la mise en route de la machine de 43m au petit matin, une panne de porte ou la collision avec un piéton. Malgré la présence d’un manuel à bord et la possibilité de liaison radio avec le poste de commandement, il est essentiel de maîtriser les bases. Les tractionnaires ont d’ailleurs une journée de remise à niveau obligatoire par an (au déroulé varié selon les besoins, par exemple pour changer de mauvaises habitudes qui endommagent les machines).

Par ailleurs, il faut justifier d’au moins 35h de conduite sur 2 mois pour poursuivre ses missions sur le terrain.

Le jour de notre venue on suit 9 stagiaires qui en sont à leur 2e jour de cours. Dès le lendemain ces hommes et femmes déjà en poste dans l’entreprise quitteront le centre de maintenance pour transporter des passagers, avec un formateur à leurs côtés pour actionner le freinage d’urgence en cas de besoin. Pêle-mêle on découvre que :

  • Chaque tram dispose d’un équipement capable de détecter automatiquement une perte d’adhérence, et donc de lâcher du sable sur la voie pour éviter ls glissades
  • La préparation matinale d’une rame nécessite un protocole strict et obligatoire qui prend précisément 17 minutes (vérification de sécurité, mise en route des équipements, tests d’annonces sonores…)
  • Les tractionnaires sont obligés de « gonger » (actionner leur sonnette) quand ils croisent un autre tram (une fois au nez et une fois au cul) ou à l’entrée d’une station… mais seulement de 6h à 22h
  • La première rame du matin circule à vitesse réduite car elle passe les aiguillages « à vue », donc doit vérifier qu’il n’y a pas eu de sabotage dans la nuit
  • La signalisation spécifique à la ligne de tram se dénomme SLT pour Signalisation Lumineuse de Trafic
  • On dit « FU » pour freinage d’urgence
  • Une rame s’autoteste régulièrement pour vérifier le bon fonctionnement de ses dispositifs de sécurité
  • Un tram peut rouler en marche arrière mais maximum à 3km/h (manœuvre utile uniquement pour remorquer une autre machine)
  • En cas de panne du système automatique, il est possible de déclencher un aiguillage manuellement

Il est temps de passer aux choses sérieuses sur la voie R5 du centre de maintenance. On se place donc dans la cabine avec Nicolas Rigault, formateur référent de Fil Bleu. Première action à mener : tourner 2 ou 3 fois une clé à gauche du tableau de bord (c’est elle qui allume le poste de contrôle). Ensuite, il faut saisir la manette de contrôle de vitesse et surtout garder perpétuellement le pouce en mouvement. Si on le laisse immobile plus de 10 secondes, on reçoit une alerte sonore… Et si on ne réagit pas en moins de 3 secondes c’est freinage d’urgence automatique. Une arme anti-malaise.

Le levier est tout simple : une position avant pour accélérer, une position centrale pour maintenir sa vitesse et si on pousse vers soi c’est le freinage. A droite, on garde la main sur le bouton pour « gonger » dès que nécessaire (on avait toujours rêvé de le faire, et c’est très amusant !). Étonnamment, tractionner une machine de 55 tonnes ne parait pas poussif… il faut dire qu’elle a 1 200 chevaux sous le capot. On ressent la douceur, la facilité à se mouvoir sur les rails. Mais attention aux réflexes : sur 400m de formation on a déclenché une alarme et deux freinages d’urgence. On a même failli dépasser un feu rouge ce qui aurait entraîné toute une série d’alarmes. Bon, en vérité pas de danger : à Vaucanson, la vitesse est limitée à 10km/h. Mais même à cette allure, les sensations sont là.

Olivier Collet

Article publié pour la première fois en octobre 2021.

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