Ce Tourangeau traque les références historiques dans « Game of Thrones »

Et il en a fait un livre.

Dans la foule d’internautes qui s’apprête à lire cet article, pas de doute, une bonne partie attend avec impatience les ultimes épisodes de Game of Thrones promis pour l’été 2019. S’il a déjà dévoré tous les livres, Cédric Delaunay fait également partie de ce groupe. Prof d’histoire au Lycée Descartes de Tours où il entame sa 8ème année, l’enseignant est devenu fan du Trône de Fer dès la parution des traductions françaises des ouvrages de George R. R. Martin : « il y a une vraie profondeur, une intrigue bien ficelée… et à l’évidence des références historiques implicites retravaillées par l’auteur. »

Le constat de Cédric Delaunay est encore plus évident lors de l’arrivée des premiers épisodes de la série télé en 2011 : « un tas d’événements ont une épaisseur historique forte et c’est une des clés du succès : ça parle aux gens parce que cela fait écho à la culture historique de tout le monde. »

De l’Empire Romain à la Seconde Guerre Mondiale

La liste des figures du passé qu’il a repérées comprend Catherine de Médicis, César, le phare d’Alexandrie, les prisons du Moyen-Age ou Jeanne d’Arc mais aussi de grands événements comme le massacre des Omeyyades par les Abbassides en 750 en Irak : « en vrai cela commence lors d’un ‘dîner de réconciliation’ quand un poète apparait devant les convives et déclame qu’il faut massacrer tout le monde. Dans le roman et dans la saison 3 de la série Game of Thrones, c’est via une chanson et une musique lancinante jouée par l’orchestre. Dès qu’elle se déclenche, il y a un temps d’arrêt. Ça a fait ‘tilt’ tout de suite dans ma tête. »

Des exemples comme celui-ci, le prof sériephile peut en citer des dizaines. Assez logiquement, il n’hésite pas à utiliser ces passerelles devant ses élèves, quitte à les menacer de spoilers lorsque les romans étaient encore en avance sur les épisodes afin de ramener le calme en classe.

Une quarantaine de chapitres

Aujourd’hui, il sort un livre de 320 pages richement illustré entièrement consacré aux références historiques de Game of Thrones : « il y a 8 lieux, 9 groupes, 8 événements et 12 personnages, chaque chapitre pouvant se lire indépendamment » précise l’auteur qui veut à la fois s’adresser aux fans mais aussi aux férus d’histoire (il en a récemment convaincu un de se mettre à regarder les épisodes). Comme il le rappelle lui-même n’est pas le seul à s’intéresser de près aux références enfouies dans cette œuvre littéraire et télévisuelle : « Marianne Chaillan, une collègue prof de philosophie de Marseille, a également sorti un très bon livre sur la métaphysique des meurtres » (disponible aux éditions Le Passeur).

Naturellement, les scènes historiques du Trône de Fer ne sont pas un copié-collé de la réalité, d’où la présence de dragons ou de morts vivants. Cédric Delaunay cite un exemple marquant : « dans la série, un mur sépare le royaume des humains du Nord peuplé de sauvageons. Ils se massent contre le mur et des zombies leur cavalent aux fesses. Cette idée de frontière, Martin dit qu’elle lui est venue lors d’une visite sur le site du mur d’Hadrien entre l’Ecosse et l’Angleterre. Il l’a fantasmé de façon géniale en trouvant un truc plus effrayant que des Ecossais et qui fout vraiment les jetons. »

Dans Game of Thrones, « on ne meurt pas par hasard »

Passionné et didactique, Cédric Delaunay a travaillé deux ans sur son livre avant de le publier cet automne. La sélection qu’il documente n’est qu’un échantillon de tout ce que l’on peut repérer dans les aventures du Trône de Fer : « on sent bien que les créateurs ont une grosse culture historique » indique-t-il, notant que les références – volontaires ou non – sont internationales et étalées dans le temps, de l’évocation de la mort de César à une scène qui fait écho à un épisode méconnu de la Seconde Guerre Mondiale : « quand la reine Cersei se fait tondre, on peut penser aux femmes tondues de 1944 », des interprétations qui dépendent de la sensibilité de chacun(e).

Tant qu’on l’avait en face de nous, on en a profité pour poser une question philosophique au prof tourangeau sur Game of Thrones : pourquoi autant de morts, y compris de personnages clés ? « Ceux qui se font zigouiller ne meurent pas par hasard », prévient Cédric Delaunay, « ce sont des gens qui n’ont pas tellement d’épaisseur historique. En revanche ceux qui se maintiennent sont attachants par leur complexité même s’ils sont antipathiques à priori. Ils deviennent sympathiques, ou au moins attachants via leur face noire ou leur fragilité. » Une preuve de plus que dans cette série, rien, vraiment rien, n’est lié au hasard.

Olivier Collet

Game of Thrones, de l’histoire à la série par Cédric Delaunay, 26€ aux éditions Nouveau Monde. Il sera en conférence à la Boîte à Livres le 15 novembre à 19h30 et parlera par ailleurs des animaux dans la série lors des Salons de Choiseul cette même semaine.

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