Avec son swap toxique, Tours a perdu des millions

Ce mardi, le conseil municipal a autorisé la résiliation du contrat souscrit en 2006 et dénoncé dès 2012.

Il n’y avait qu’un point à l’ordre du jour du conseil municipal de Tours ce mardi. Mais une délibération cruciale, car de son adoption dépendait l’avenir financier de la commune. Les élus étaient appelés à se prononcer pour ou contre un accord à l’amiable trouvé avec une filiale du Crédit Agricole afin de résilier le swap toxique contracté en 2006 et qui aurait dû coûter 8,9 millions d’euros à la mairie cette année après les 6,9 millions déjà dépenses en 2015 (on vous explique tout très simplement dans cet autre article).

Inutile de faire de faux suspens : le projet a été adopté, avec des applaudissements de la majorité. C’est dire à quel point les élus sont heureux de se débarrasser de ce boulet financier devenu toxique en 2010 et qui risquait encore une fois d’entraîner une hausse des impôts et un blocage des projets municipaux. Un héritage empoisonné de l’époque de Jean Germain malgré l’ouverture d’une action en justice par l’ancien maire fin 2012. « Le contenu de cet accord est positif et nous permet de sortir de ce mauvais pas » s’est félicité le maire Serge Babary.

Pénalités amoindries

Au lieu de payer 8,9 millions cette année, Tours en versera 3,5 millions maximum, et sur 4 ans. Donc dans les prochains jours, il faudra ‘seulement’ débourser 875 000€ soit 8 millions de moins que prévu, ce qui aurait représenté 10% de hausse d’impôts locaux. « Nous avons mis tout notre poids politique dans la négociation. Je suis allé rencontrer en personne le président de la CACIB (la banque concernée, ndlr) » a encore précise Serge Babary assisté de son adjointe aux finances Françoise Amiot.

« A notre connaissance, les accords signés par d’autres villes pour des swaps toxiques similaires sont moins avantageux » a également noté l’élu qui ne voulait pas s’engager dans une longue bataille judiciaire sans être certain de gagner (et parce qu’il a vu que beaucoup d’autres ont perdu à ce jeu-là) : « le seul argument que l’on pouvait utiliser c’était le défaut de conseil. Mais comme la banque a averti à plusieurs reprises la ville du danger du swap dès 2009 ça ne tenait pas. » A l’époque, la CACIB proposait une clôture du contrat moyennant un remboursement de 6,5 millions d’euros. Depuis ce jour et en incluant ce qu’il reste à verser, la ville en a déboursé 17,5 soit 9,5 millions d’euros de plus. Le pari sur la reprise économique fait par l’équipe de Jean Germain ou celui d’une issue judiciaire rapide se sont donc avérés vains. « Seule une procédure a abouti en faveur d’une collectivité, c’est Lille, et parce qu’il y avait eu défaut avéré de conseil » a encore noté Serge Babary.

Passe d’armes entre majorité et opposition

Dans l’opposition socialiste composée d’anciens élus de Jean Germain et menée par Cécile Jonathan, la vision des choses est bien différente : « on ne sait pas si c’est un bon accord ou pas. Le résultat est surtout positif pour la banque qui récupère un total de 17,5 millions d’euros. Nous continuons à estimer que nous avons été mal conseillés. » Selon elle, la procédure judiciaire était suffisamment solide pour aboutir à une victoire de Tours : « il y a deux ans, les banques ont été condamnées au niveau européen et en décembre, la ville de Laval qui avait souscrit le même type de produit que nous pour 33 millions d’euros a obtenu une médiation pour discuter de dommages et intérêts. Et le maire de cette ville n’est pas n’importe qui, c’est un ancien secrétaire d’Etat au budget de Jacques Chirac. » « Ce jugement n’est pas définitif, ce n’est donc pas un modèle de réflexion. Et puis il donne le coup d’envoi d’une médiation. Seulement maintenant, alors que nous, nous avons débuté la nôtre il y a un an » a rétorqué Serge Babary en séance.

Mais toujours selon Cécile Jonathan, à trop vouloir accabler l’ancienne majorité, l’équipe actuelle oublie un détail : « sur l’ensemble des 20 swaps souscrits par la ville, c’est le seul qui s’est avéré toxique. L’ensemble reste positif. Faire croire que le swap a ruiné la ville est une façon de réécrire l’histoire. Et surtout malgré cela, nous avons diminué la dette pendant 19 ans en n’augmentant les impôts qu’une seule fois. On demande à voir si la nouvelle équipe poursuivra cet effort. Nous prenons donc acte qu’elle souhaite terminer cette séquence pour se donner une aisance financière, on le comprend. On espère maintenant que Serge Babary tiendra sa promesse de ne pas augmenter les impôts… »

Et bien que la réunion de ce 19 janvier ait mis un point final définitif au dossier, nul doute qu’il s’invitera encore régulièrement dans les débats municipaux vu qu’il ne se passe pas un conseil sans que le nom de Jean Royer ne soit prononcé. De plus, à l’horizon 2023 et 2028 Tours devra se débarrasser d’autres méchants produits financiers : des prêts in fine dont les différents élus se disputent déjà la responsabilité…

Olivier COLLET

Pour les autres groupes d’opposition, Pierre Texier (PCF) a résumé cette affaire du swap toxique « à la petite histoire de la soumission de certaines forces politiques face aux puissances financières. » « J’espère que l’argent retrouvé servira à ceux qui en ont vraiment besoin » a voulu noter Gilles Godefroy pour le FN. « Il est évident que la ville a signé ce contrat librement mais aussi que les systèmes bancaires ont largement failli après la crise financière » pour l’élu EELV Emmanuel Denis.

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