On a parlé à 2 industriels qui fournissent restaurants et boulangeries

Pour comprendre un peu comment ils fonctionnent.

Dimanche et lundi le Parc Expo de Tours accueillait le salon Rest’Hôtel, un événement dédié aux professionnels de la restauration ou de l’hôtellerie. En deux jours, on a pu y découvrir un concours de croissants, un autre consacré aux étals de bouchers… Dans les allées, plus de 150 exposants qui proposent des fours, des lits, des produits frais, du vin, de la farine, de quoi laver la vaisselle… Et puis d’un coup on tombe sur deux brochures : celles d’industriels qui proposent des plats tout faits pour des restaurants ou des produits prêts à vendre aux boulangeries-pâtisseries.

On ouvre la première au message suivant « Avec nous, pour le goût » et le slogan de l’entreprise brake qui l’édite, « goûtez la différence ». La différence, ce sont donc une pizza surgelée bœuf-mozza qu’il suffit de réchauffer au four en 10-12 minutes, des nems, des feuilletés au fromage, des lasagnes, du dos de colin d’Alaska préfrit, ou un filet de poulet pané. Les arguments commerciaux ? « Sans viande reconstituée », « sans huile de palme », « découpe naturelle », « viande d’origine France », « enrobage au bon goût de fromage » voire même « espèce originale » (pour… du merlu !). Bref, de quoi convaincre les restaurateurs d’opter pour ces plats faciles à réchauffer et donc à servir. Gain de temps et d’argent. Mais le client ne sera pas forcément mis au courant au moment du service…

10 à 15% des commandes pour des plats déjà prêts

Dans la brochure, tout y est : la liste des ingrédients, les valeurs nutritionnelles… Quelques colorants mais en quantité relativement limitée. On a voulu en savoir un peu plus sur ces produits et si on avait de grandes chances de les retrouver dans nos assiettes. Un responsable accepte de nous répondre pour peu que son nom ne soit pas cité. Il nous explique que son entreprise est en train de se regrouper avec Davigel pour composer Sysco, une marque qui propose tout : de la conception des recettes à la fabrication des produits. Mais il insiste bien : la société vend aussi des produits frais, et le volume de commande ne cesserait de progresser : « nous faisons attention aux appellations et aux produits IGP. Nous proposons de plus en plus de porc breton ou de de bœuf de l’Ouest » nous indique-t-il.

Selon notre interlocuteur, la livraison de plats déjà prêts comme ceux que l’on a vu dans la brochure ne représente que 10 à 15% des ventes du grossiste : « il y a de plus en plus d’attrait pour le fait maison. » Précisons tout de même qu’un restaurateur peut très bien proposer un poisson pané surgelé avec une sauce préparée de A à Z et indiquer que la combinaison des deux est « faite maison ».

Le représentant de brake ajoute qu’aujourd’hui, 70% des produits vendus par l’entreprise sont français, une proportion en hausse. Et le bio ? « On a une offre, surtout pour les légumes. » D’ailleurs l’entreprise ne cesse de s’adapter aux nouvelles tendances culinaires : « nous proposons 70 à 80 nouveautés par an, produits bruts et déjà prêts confondus, en allant vers le manger sain ou naturel. Nous faisons par exemple la chasse au sel pour notre jambon. »

38 centimes le croissant surgelé à l’unité

Deuxième brochure qui tombe dans nos mains, celle de DGF qui a une succursale à Tours, du côté du Boulevard Louis XI. Cette société livre des matières premières ou de produits à cuire voire surgelés à décongeler aux professionnels de la boulangerie pâtisserie. Plus de 250 pages de produits, cette fois sans la liste d’ingrédients mais avec les prix. La pizza précuite avec fond de tomate ? 1€10. 1€17 le feuilleté poulet-lardons, 3€ la plaquette géante de pain de mie, 38 centimes le croissant, 40 centimes pour le pain au chocolat… La liste semble infinie, de quoi proposer un étal très coloré mais complètement standardisé.

Là-encore, on se présente auprès d’un responsable qui accepte de nous répondre anonymement. Comment sont fabriqués les produits ? « Tout est fait mécaniquement à notre siège parisien. » Comment savoir que le produit a été surgelé quand je l’achète ? « Normalement les professionnels doivent l’indiquer avec un petit flocon ou un pingouin mais c’est vrai que beaucoup ne le font pas » (la mesure concerne les produits achetés surgelés ou qui ont été en partie surgelés pendant leur fabrication comme les macarons, ce afin d’indiquer au client qu’ils ne doivent pas être recongelés) Sont-ils vraiment si nombreux à acheter ces produits ? « Ils représentent environ 60% de nos ventes contre 40% de produits frais et ça augmente encore. Pour eux c’est un gain de temps et de personnel. On vit dans un monde speed. »

Du pain rose ou à l’encre de seiche

Si un boulanger est obligé de fabriquer son pain lui-même pour se présenter comme tel, aucune règle n’impose de faire des viennoiseries ou pâtisseries maison (en Touraine il existe tout de même un label Viennoiseries 100% Maison pour s’y retrouver). La règle est identique pour le snacking, toute l’offre des boulangeries pour le déjeuner. Elle augmente, et elle aussi vient souvent des catalogues d’industriels : « ils sont obligés de fonctionner comme ça s’ils veulent lutter contre Marie Blachère ou Feuillette » argumente notre contact. Il ajoute : « on les encourage à faire du frais mais s’ils ont vraiment décidé de faire du surgelé on va leur en vendre. On écoute la demande : s’ils coulent, on coule. » A noter que les produits frais de DGF sont souvent locaux « et depuis longtemps, comme le lait et la crème qui viennent de la Laiterie de Verneuil. »

Comme son confrère de la restauration, l’entreprise s’adapte aux tendances avec du pain à l’encre de seiche ou… rose ! « 70% de la vente se fait au visu, si c’est joli on aura envie de goûter. On s’adapte à la demande qui veut du spectacle. » A ce moment-là, le côté artisanal du produit ne sera donc pas la priorité de la clientèle.

Olivier Collet

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