327 mineurs étrangers accueillis et accompagnés en Indre-et-Loire

Nous avons pu rencontrer trois d’entre eux.

Selon le Conseil Départemental d’Indre-et-Loire, la Touraine est l’un des 15 départements de France où il y a le plus de mineurs étrangers isolés qui se présentent aux services sociaux pour être hébergés et soutenus jusqu’à leurs 18 ans. Souvent en provenance d’Afrique subsaharienne, il s’agit en général d’hommes de 13 à 15 ans passés par la Libye ou le Maroc avant de rejoindre la France, puis le Val de Loire. Pour bénéficier d’un accompagnement par l’Aide Sociale à l’Enfance, leur minorité doit être reconnue par les services sociaux qui pratiquent une évaluation de 2 à 3h via un questionnaire et font, si besoin, des vérifications auprès de la police aux frontières voire demandent un examen de l’âge osseux, malgré le débat très vif autour de l’efficacité de cette technique (le défenseur des droits la juge « indigne »). Nous vous détaillons l’ensemble de ce processus ce mercredi dans un article publié sur 37 degrés.

Depuis le début de l’année, 448 personnes ont été reçues par les 4 agents chargés de réaliser les évaluations au Champ Girault, contre 167 à la même époque l’an dernier, 553 sur l’ensemble de l’année 2017, 269 en 2016. Pour 2018, 169 ont effectivement été reconnues mineures (environ 1 sur 3), elles seront donc prises en charge jusqu’à leur majorité dans un hébergement financé par le département, avec en prime un suivi de leur scolarité, de leurs démarches administratives et de leur état de santé. Au total, 327 jeunes sont actuellement intégrés dans le programme d’aide sociale à l’enfance.

La priorité : trouver une formation

En raison de l’augmentation du nombre de MNA en Touraine, les élus ont choisi de confier leur suivi à plusieurs associations dans le cadre du DAEMNA, le Dispositif d’Accompagnement Éducatif des Mineurs Non Accompagnés. Parmi elles : Jeunesse et Habitat ou l’ADSE37. Basée sur le site de la Chaumette, cette dernière qui exerce déjà en Île de France depuis 2000 et en Touraine sur l’accueil d’enfants en hébergement « classique » a entamé ses travaux au printemps et accueille déjà une quarantaine de jeunes, ils seront une centaine au début de l’été. Tous ne sont pas rassemblés, mais répartis dans des appartements à Tours, Amboise voire même Loches, Chinon et Bourgueil dans des logements « au plus près de l’employeur » afin de leur faciliter une insertion professionnelle mais aussi proches des transports en commun pour pouvoir suivre les cours en CFA.

A proximité de l’IUT de Tours Nord, on a poussé la porte du repère de 3 jeunes ivoiriens qui vivent en colocation au 4ème étage d’un petit immeuble, dans un T4 meublé loué à Val Touraine Habitat où chacun à sa chambre et est libre de sa décoration (dans une des chambres, il y a des posters de foot sur tous les murs)… Même si le rendez-vous a été arrangé, ils ne souhaitent pas être reconnus, nous ne dévoilerons donc ni leurs photos, ni leurs prénoms. Tous ont entre 16 ans et 16 ans et demi… L’un d’eux évoque son long voyage via la Lybie, la traversée de la Méditerranée dans un bateau avec une centaine de personnes, on apprendra plus tard que son frère – parti avec lui – est mort en chemin, tandis qu’un autre a laissé sa petite sœur en Côte d’Ivoire ne pouvant pas prendre la route avec elle.

Des parcours professionnels suivis de près

Face à ces récits douloureux, les adolescents sont suivis de près par des psychologues et, plus globalement, ils reçoivent au moins une visite par jour de la part d’un éducateur ou de conseillers en insertion professionnelle, une astreinte est également joignable 24h/24. Pour leur vie quotidienne, ils reçoivent des coups de pouce (en cuisine, par exemple) mais l’objectif principal c’est de leur trouver des formations : l’un est en stage en pâtisserie à Tours Centre, un deuxième est dans l’électricité « ébloui » par ce secteur dont il dit rêver depuis l’enfance et le troisième expérimente plusieurs filières, entre plomberie et cuisine. Pour faciliter les découvertes, l’ADSE37 peut elle-même accueillir des stagiaires, par exemple dans sa cuisine centrale.

(Re)lire notre article d’avril sur les déclarations du département au sujet des MNA

« Ce qu’on cherche à faire c’est à leur faciliter l’insertion sociale et les aider à être autonomes » poursuit le professionnel, « il y a beaucoup d’employeurs qui jouent le jeu parce qu’ils ont des besoins et on a de vraies réussites avec des embauches. Aujourd’hui on en a qui sont responsables d’équipe et accueillent d’autres jeunes stagiaires étrangers. » En résumé, « certains jeunes arrivent avec des situations déjà bien avancées avec des envies professionnelles mais pour d’autres c’est le néant. Il y en a qui ont des traumatismes et des difficultés cognitives, beaucoup de dossiers relèvent du handicap » précise Richard Plantureux, justifiant le suivi psychologique mais aussi l’accompagnement médical via un bilan de santé et des rendez-vous réguliers chez des professionnels.

De l’argent de poche pour acquérir l’autonomie

S’ils trouvent une formation pérenne, les jeunes apprentis peuvent bénéficier d’un appartement sans colocataire. A chaque fois, le loyer et les charges sont pris en charge par l’association grâce aux financements du département et une somme mensuelle est reversée à chaque bénéficiaire du DAEMNA : 50€ pour les courses chaque semaine, mais aussi de quoi s’habiller, acheter des produits d’hygiène… Ils ont également droit à une carte Fil Bleu, une licence sportive par an et à 40€ d’argent de poche pour leur forfait de téléphone ou pour acheter un vélo, une somme supprimée s’ils ont un contrat d’apprentissage. L’association leur confie enfin une carte avec leur identité, elle est non officielle mais reconnue par la police en cas de contrôle car elle porte une photo + le cachet de l’ADSE.

Dans leur appartement, les jeunes peuvent recevoir de la visite mais n’ont à priori pas le droit de découcher ou d’accueillir du monde pour la nuit, ce qui n’empêche pas ceux que nous avons rencontré de s’être rapidement constitué un bon réseau amical et d’attendre avec impatience le début de la Coupe du Monde pour suivre les matchs et supporter la France… à défaut de suivre la Côte d’Ivoire qui ne s’est pas qualifiée pour le mondial.

Olivier Collet

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