A Amboise, les charmes italiens de Château Gaillard

Totalement rénové depuis 2011, le monument parie sur ses jardins et ses agrumes.

Vous connaissez le dicton ? « Pas folle la guêpe. » Il y en a justement une qui tournoie autour d’un petit pot dans la boutique du Château Gaillard d’Amboise, installée en extérieur, à flanc de coteau. Sur l’étiquette, on lit « gelée de fleur d’oranger ». On prend un petit bâton de plastique pour voir ce que ça donne en essayant de faire fuir l’insecte et on comprend mieux l’obstination de la bestiole qui pourrait aussi trouver son bonheur dans le pot de miel réalisé grâce aux abeilles issues des 12 ruches du domaine. Elle pourrait également se faire plaisir avec la confiture d’orange réalisée sur place. Ce trio de gourmandises est tout simplement exquis (le gâteau à l’orange vaut aussi le détour).

Voilà donc ce que vous pourrez ramener de votre passage à Château Gaillard : des petits pots issus des agrumes qui poussent dans les orangeries du monument, « les premières de la région » précise Marc Lelandais, propriétaire des lieux depuis 2011 et qui a investi plusieurs millions d’euros pour faire d’énormes travaux de rénovation et ouvrir ce grand espace de 15 hectares au public. De quoi faire partager sa passion pour l’Italie, ses connaissances sur l’influence des Italiens dans la Renaissance française et sa grande collection d’orangers, citronniers et autres arbres à agrumes (160 aujourd’hui, bientôt 200 pour disposer de toutes les variétés).

L’ex chef de grande entreprise (le groupe Vivarte) qui fait désormais dans le consulting (entre Londres et Paris) et a tenté sa chance aux dernières élections législatives (via le mouvement 577) passe donc aujourd’hui une bonne partie de son temps à s’occuper de son nouveau projet. Il le gère à la façon d’une société, n’hésitant pas à parler de Château Gaillard comme d’une marque.

En faisant la visite, il n’occulte aucun détail : remonte une horloge, vérifie que les lumières sont bien éteintes (ou allumées), que les fenêtres sont bien ouvertes (ou fermées), trouve un tronc au fond d’un bassin alors qu’il n’a rien à faire là… Il a l’œil partout et pense encore à des dizaines de projets pour rendre mémorable la balade à Château Gaillard : « nos visiteurs passent en moyenne 2h30 sur place » se félicite-t-il par exemple.

Il est vrai que l’endroit à de sacrés atouts. En ce jour de grosse chaleur, les espaces frais sont innombrables. Sous les arbres, ou dans les grottes. « Et l’hiver, je suis parfois en bras de chemise en plein mois de janvier » s’amuse Marc Lelandais. Construit au bas du coteau, face au sud, le château est protégé du vent du Nord. Dans la roche, de nombreuses grottes sont creusées. L’écurie ? Une grotte. La boulangerie du XIIIème siècle ? Une grotte. Il y a aussi la « grotte du diable » et sa minuscule entrée au ras du sol, que les enfants adorent pour se cacher. Et une autre où un jeu olfactif a été imaginé. Tout près, côté est, c’est la grande forêt avec sa petite source, et en bas du terrain la rivière La Masse. Côté ouest, vers l’entrée, on passe forcément par le très beau jardin italien, taillé au millimètre avec ses houx, ses vignes, ses fruits rouges…

« Contrairement à ce qui se fait pour les jardins à la française, les Italiens ne dominent pas la nature, ils la domestiquent » professe Marc Lelandais en naviguant dans les allées. Les plantes et arbustes sont entourés de roches (granit, tuffeau) ou d’ardoise « pour garder la chaleur 24h/24. » Toute l’année, 2 jardiniers s’occupent des espaces naturels où vivent également renards et chevreuils sauvages : « peut-être qu’ils partent parfois mais ils reviennent ensuite. Ici, ils ne sont pas chassés. »

Face aux photos du site qu’il a racheté il y a six ans et qui sont présentées dans la chapelle, le nouveau propriétaire raconte : « c’était une jungle urbaine. » Il a donc entrepris un vaste plan pour redonner tout leur faste aux « Jardins du Roi ». A la fin du XVème siècle, Charles VIII l’amboisien est revenu d’une campagne italienne avec 22 artistes et a décidé de faire construire Château Gaillard (ça a pris 23 ans). Les jardins, c’est l’œuvre de Don Pacello, « le plus grand jardinier d’Europe » (dont la signature et le blason ont été retrouvés tout récemment). C’est donc lui qui importe la culture italienne en France à l’aube de la Renaissance, installe une première fontaine au bas du Château (remise en eau il y a quelques jours après un long assèchement).

Aujourd’hui, Château Gaillard propose autour de 5km de promenades dans la forêt avec une longue allée de 400m de long et 4m de large sous les platanes ou des chemins plus escarpés qui passent au-dessus du bâtiment qui culmine déjà à 23m de haut (le coteau atteint 32m). « Il y a de quoi faire des randonnées. On peut aussi se reposer au coin Sieste House que l’on a aménage en bas avec vue sur le château ou venir prendre le goûter sur la terrasse » détaille Marc Lelandais qui espère autour de 30 000 visiteurs cette année avec 7 mois d’ouverture (l’an dernier, il a ouvert 3 mois et un seul mois en 2015).

L’objectif du propriétaire Tourangeau de cœur et Mayennais de naissance : attirer les visiteurs de la région, notamment les Amboisiens désireux de trouver le calme d’un parc (un pass annuel à 29€ pour des venues illimitées leur est proposé) mais aussi les touristes qui viennent en famille ou entre amis, pas en grand bus. Sa com’ il la fait sur Facebook, auprès des chambres d’hôtes, des hôtels… Il veut que les balades restent intimes, que le calme règne…

Les visiteurs sont répartis en petits groupes, les visites guidées sont assurées par des élèves en dernière année de l’école du Louvre et sont gratuites (le prix d’entrée est lui de 11€ pour les adultes). En parcourant le rez-de-chaussée du château, on découvre par ailleurs la grande collection de Marc Lelandais, habitué des brocantes d’antiquaires du Mans où il chine dès 6h du matin. Il y a notamment ce formidable billard en noyer du XIXème siècle qui happe le regard dès l’entrée ou le plus discret presse-agrume historique. « Je suis peut-être le seul collectionneur de presse-agrumes en France » suppose le propriétaire qui a aussi un exemplaire d’une machine à laver expérimentale qui a trouvé sa place… dans la boulangerie.

Si en cet été 2017 Château Gaillard réalisé sa première saison complète (il est ouvert chaque après-midi dès 13h), les projets ne manquent pas pour la suite. Régulièrement pendant le tour du domaine, Marc Lelandais évoque ses envies : restaurer le cachot, créer des ateliers pour les enfants dans les grottes, organiser des expositions d’artistes contemporains en lien avec les agrumes, proposer d’accueillir des réceptions dans certaines salles, acheter de nouvelles statues et fontaines pour compléter les aménagements du parc, étoffer la boutique… « Mais tout ce que je fais, je veux que ce soit en lien avec l’ADN du lieu », autrement dit l’influence italienne ou l’univers des agrumes. Tout l’été, des nocturnes sont aussi proposées le vendredi soir avec illuminations à la bougie… Et le propriétaire n’hésite pas à ouvrir ses portes aux scouts qui peuvent venir en camp quelques jours.

Olivier COLLET

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