Prévention de la radicalisation : Pontourny inquiète toujours

Le centre de Beaumont-en-Véron accueillera ses premiers pensionnaires avant la fin du mois.

« Ce ne seront pas des terroristes » ne cesse de répéter le préfet d’Indre-et-Loire Louis Le Franc quand il parle des futurs jeunes de 18 à 30 ans « en voie de radicalisation » amenés à faire un séjour de 10 mois maximum dans le premier centre de prévention de la radicalisation de France installé à Beaumont-en-Véron, dans le sud de l’Indre-et-Loire. « Ils n’auront pas de casier judiciaire, ils ne seront pas fichés S, ils n’auront jamais combattu en Syrie ni ailleurs… » avance encore le représentant de l’Etat en Touraine. Pas facile de trouver les mots pour rassurer la population des alentours et les élus. Surtout lorsque l’on affirme juste après qu’il s’agit de personnes déjà suivies par les services de renseignements et qu’elles continueront de l’être même après leur séjour.

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Depuis la révélation de l’emplacement de ce premier centre de « déradicalisation » (officiellement nommé « centre de prévention, d’insertion et de citoyenneté ») à Pontourny, les débats n’en finissent pas. Parce que la communication a été hasardeuse au début. Mais aussi parce que le contexte est tendu, alors que les attentats se font récurrents sur notre territoire. « Je comprends les habitants qui ont peur… » lâche le député Laurent Baumel. Jean-Luc Dupont, maire de Chinon et président de la communauté de communes du Chinonais qui englobe Beaumont-en-Véron, explique lui que, s’il a fini par donner son aval son projet c’est surtout parce qu’il permettait de préserver les emplois de l’ancien centre pour mineurs isolés géré par la mairie de Paris. Il l’a même dit en conférence de presse rappelant sa « non-opposition » au centre et non son adhésion. Notamment parce que l’Etat l’a imposé.

Dans les rangs des élus, la seule à avoir été vraiment positive lors de la conférence de presse organisée sur place ce mardi c’est la sénatrice Stéphanie Riocreux qui évoque « une chance » pour le territoire. Laurent Baumel évoque plutôt « un nouvel avenir » pour Pontourny, « seul le temps pourra effacer les craintes des habitants », « on ne pourra pas les atténuer définitivement » estime-t-il. Dans le village, on se sent un peu trahi par les politiques : « ils auraient pu démissionner… » soufflent des militants de l’association Radicalement Dignes de Pontourny qui manifestent à l’entrée de la petite route qui mène au centre, en plein Soleil, à proximité du barrage de gendarmerie installé pour l’occasion. « Le maire de Chinon, il est passé en baissant la tête » lance un autre, comme pour souligner que les élus n’assument qu’à moitié leur position.

Ces Tourangeaux engagés contre le projet depuis sa révélation se plaignent de ne pas être entendus, et profitent donc de la tribune médiatique pour dire toute leur colère contre ce centre qu’ils voient comme une « colonie de vacances. » Ils racontent leurs peurs. Peur de voir des résidents s’échapper et s’en prendre à eux. Le mot « psychose » est lâché. Certains ont fait des devis pour installer des alarmes ou des caméras. Le président de l’association qui compte une petite centaine de membres raconte que désormais, il active l’alarme la nuit dans sa véranda. Les maisons qui restent ouvertes, dans le quartier, c’est fini. « On a peur que nos maisons perdent de la valeur, ça les élus ça ne les intéresse pas. »

Depuis peu, Radicalement Dignes de Pontourny s’est même adjoint les services d’un avocat qui pense avoir trouvé une faille : la demeure de Pontourny a été léguée. Et selon lui, le texte du legs est en contradiction totale avec les activités qui vont être menées dans le centre de prévention de la radicalisation. Selon lui, un point important du document stipule qu’il faut qu’il y ait une messe tous les dimanches dans la chapelle de la bâtisse (en contradiction totale avec la laïcité qui sera enseignée ici, même si les pratiques religieuses seront autorisées sur les temps libres). L’homme essaie donc de retrouver les descendants de l’ancien propriétaire pour savoir s’ils comptent engager une action en justice. Reste à savoir ce qu’elle pourra donner, d’autant que ça fait sans doute un moment qu’il n’y a pas eu d’activité religieuse dans la chapelle en question, vu la précédente fonction du bâtiment.

De son côté, le Front National monte aussi au créneau dénonçant « une manipulation de l’opinion » et « un projet délirant ». « Si les futurs pensionnaires de Pontourny ne sont ni des délinquants, ni des malades mentaux, il n’y a aucune raison que l’Etat les entretienne. Qu’ils restent chez-eux et vivent leur vie comme tout à chacun. »

L.G.

Et combien ça coûte un centre de « déradicalisation » ?

Forcément, la question s’est posée. Impossible d’avoir une réponse claire et précise des officiels. Il semble que cela n’ait pas été chiffré. Mais sachant qu’il y aura une trentaine de salariés à temps plein plus des intervenants extérieurs et qu’il faudra aussi prendre en charge le matériel pédagogique, les vêtements des pensionnaires ou encore des frais de transports, on sait qu’il s’agit là d’un budget de plusieurs centaines de milliers d’euros. Probablement entre 1 et 2 millions d’euros selon les différentes estimations. Quant aux travaux d’aménagement, ils n’ont pas été très importants hormis ceux menés cet été pour renforcer la sécurité (18 caméras dont 6 pivotantes, centre de visionnage, détecteurs de mouvements, barreaux aux fenêtres…). Mais là encore, impossible d’avoir un chiffre.

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